A l'heure des traditionnels pronostics de début de saison, la question qui se pose au sujet du RC Lens est de savoir si la perte du titre lors de la dernière journée en mai dernier a été complètement digérée par les joueurs et les membres de l'encadrement ? La déception avait été si grande après avoir occupé la première place du classement pendant une grosse moitié du championnat que la déception est peut-être toujours présente dans l'esprit de certains. Cette crainte d'un essoufflement psychologique a peut-être conduit l'entraîneur Joël Muller à renouveler largment son effectif.

A deux semaines de la reprise du championnat, le club artésien a vendu 9 joueurs et obtenu le renfort de 11 recrues. Une telle activité dans un marché des transferts atone relève de l'exploit autant que de la nécessité. D'une part, plusieurs joueurs arrivaient en fin contrat : c'est le cas de Jean-Guy Wallemme qui a mis un terme à sa carrière de joueur pour prendre en main les destinées du Racing Club de Paris, et de Valérien Ismaël. Ce dernier a longtemps cru rejoindre le club grec d'Olympiakos mais l'affaire a capoté à cause de l'attitude de certains dirigeants grecs : "Mon agent avait trouvé un accord avec eux mais finalement les dirigeants d'Olympiakos n'étaient plus d'accord, ils ont remis leur parole en doute. Ils remettaient les chiffres de la transaction en cause. Nous leur avons donc dit que nous ne pouvions pas travailler dans ces conditions et nous avons tout arrêté."

Utaka, le nouveau Diouf 

Outre les deux défenseurs centraux, d'autres départs ont été conclus par Gervais Martel et Joël Muller, principalement des joueurs sur lesquels le club ne comptait plus. Le milieu de terrain Mickaël Debève, prêté à Middlesborough en cours de saison dernière a rejoint Amiens en Ligue 2, le Tchèque Radek Bejbl est rentré dans son pays pour défendre les couleurs du Slavia Prague, et deux jeunes attaquants formés au club, Mathieu Bucher et Bouabid Bouden ont été prêtés respectivement à Wasquehal et à Beauvais pour s'aguerrir à l'échelon inférieur pendant une saison. Le latéral Franck Queudrue à pour sa part été définitivement cédé à Middlesborough pour environ pour 5 millions d'euros. Reste le cas de l'avant-centre El-Hadji Diouf dont le départ vers Liverpool (18 M€) n'était pas du tout souhaité par le staff lensois. Auteur d'une grande saison 2001-2002, le Sénégalais a profité du superbe parcours de son équipe nationale à la Coupe du Monde pour se faire remarquer davantage encore et conclure un transfert à la fois lucratif et intéressant sur le plan sportif vers l'Angleterre. A la vue des conditions offertes par Gérard Houiller au joueur, le RC Lens ne pouvait pas lutter pour retenir son attaquant.

Pour compenser le départ fort préjudiciable de Diouf (10 buts en 26 rencontres de championnat), Joël Muller a choisi de tenter un véritable pari. Au terme d'un essai concluant, il il a engagé le Nigérian John Utaka. Ce dernier n'est pas vraiment un inconnu puisqu'il faisait partie des 23 Nigérians présents à la Coupe du Monde, disputant même en intégralité le dernier match de poule face à la Suède. A tout juste 20 ans (il est né le 8 janvier 1982), il a terminé meilleur buteur de la Coupe de la Confédération du Football Africain il y a deux ans. Utaka a joué pour la formation égyptienne d'Ismailia avant de rejoindre le club qatari de Al-Saad où Lens est allé le chercher. Son probable duo avec l'ex-lillois Dagui Bakari promet des étincelles. D'ailleurs, les premiers matches amicaux de cet été ont révélé la bonne entente des deux hommes, Bakari inscrivant trois buts en deux rencontres, contre Clermont puis Saint-Etienne (2).

En plus des deux attaquants en question, Joël Muller a aussi renforcé son milieu de terrain et sa défense. Dans le premier secteur, deux nouveaux Africains ont pris la route de l'Artois. Le Malien Seydou Keita est prêté par Lorient pour un an avec une option d'achat (environ 5 M€) et le Sénégalais Diagne-Faye (Jeanne d'Arc Dakar) rejoint ses compatriotes Sarr, Coly et Bouba Diop. En défense, les absences d'Ismaël et Wallemme seront compensées par les arrivées de l'ancien messin Rigobert Song et le transfert définitif du Polonais Jacek Bak de Lyon, encore deux mondialistes. Et pour compléter un effectif qui sera très sollicité cette saison entre le championnat, les deux coupes nationales et la Ligue des Champions, quelques jeunes espoirs ont été engagés, le défenseur central de Martigues Rod Fanni, l'attaquant manceau Olivier Thomert et trois jeunes niçois vainqueurs de la Coupe Gambardella parmi lesquels Simon Feindouno, le frère du bordelais.

Tenir la distance en France et en Europe 

Pour le moment, ce sont 32 joueurs qui composent l'effectif du Racing Club de Lens. Même si tous les postes seront doublés selon les souhaits de Joël Muller, plusieurs départs vont encore intervenir d'ici une quinzaine de jours (Coly, Rodriguez, Oulmers). C'est que l'entraîneur lensois, deux fois vice-champion de France en 1998 et 2002 connaît parfaitement les exigences du haut niveau. En 1998-1999, Metz avait disputé la Coupe de l'UEFA en plus du championnat avec un effectif faible en quantité et avait vécu une saison très loin de ses ambitions initiales (10e en D1 et et battu au première de la Coupe d'Europe). 

Or, le RC Lens affiche des objectifs élevés pour cette saison 2002-2003, tant à l'échelle nationale qu'européenne. Ainsi, une nouvelle qualification pour une Coupe d'Europe est indispensable à la fois pour maintenir le club au plus niveau et pour assurer des rentrées d'argent importantes, et Gervais Martel envisage de passer le premier tour de poules de la C1 : "le club ne recoit aucune aide et c'est déjà formidable de voir ce que l'on arrive à faire. Maintenant si on arrive à grimper sur la scène européenne, on essaiera de le faire." Avec les nouvelles installations de La Gaillette construites sur la commune d'Avion à quelques kilomètres de Lens, le Racing dispose à présent d'un outil de travail digne des plus grosses écuries européennes. Ce lieu n'est-il pas souvent comparé à Milanello, le magnifique complexe d'entraînement du Milan AC ? 

Depuis son titre de champion en 1998, le RC Lens vit une croissance contrôlée qui en fait un des meilleurs clubs de l'Hexagone au niveau des résultats sportifs et de l'évolution des structures. Malgré le traumatisme causé par la perte du titre à à Lyon il y a quelques mois, le club présidé par Gervais Martel conserve son équilibre et évite de sombrer dans une folie financière périlleuse.

Doucement mais sûrement, le RCL se prépare à vivre une nouvelle saison au sommet en Ligue 1 et en Ligue des Champions. Si tous les joueurs ont effectivement profité de leurs vacances pour faire table rase des évènements récents, alors Lens peut envisager de poursuivre sa progression à tous les niveaux.