Chelsea
: Ambition ou démesure ? |
Depuis que le sulfureux milliardaire
russe Roman Abramovitch a pris en mains le destin du FC Chelsea, il ne
se passe pas une semaine sans que le club de Londres ne deffraie la chronique.
Le directeur général de Man Utd Peter Kenyon est la dernière
recrue. Mais, ce faisant, le club ne chercherait-il pas à grandir
trop vite ?
Un dernier arrivant nommé
Peter Kenyon...
Après avoir conclu
sa campagne de recrutement de joueurs pour une somme dépassant les
110 millions de Livres Sterling, Chelsea a fait encore très fort
en débauchant l'importantissime Peter Kenyon, directeur général
de Manchester United de son état depuis trois ans et qui occupera
les mêmes fonctions chez les Londonniens. Roman Abramovitch se dote
ainsi d'un des hommes clés de l'un de ses principaux concurrents
en championnat anglais, la nouvelle ayant déclenché par ailleurs
une baisse de l'action mancuniène à la Bourse de Londres.
MU perd ainsi un homme compétent et polyvalent à bien des
niveaux. Sur le plan sportif, Kenyon est à créditer des venues
de joueurs de premier plan tels que Veron ou Van Nistelrooy et ses talents
de négociateur seront utiles à Abramovitch, quant il s'agira
d'attirer les meilleurs sponsors possibles (Vodafone et Nike sont partenaires
de Manchester grâce à lui). Certainement déçu
par l'incapacité des Reds Devils à faire l'effort pour recruter
Ronaldinho et n'ayant pas apprécié le départ de Beckham
(bien qu'il l'ait lui même conclu) pour le Real, Kenyon voit là
un nouveau défi pour poursuivre sa carrière. Mais il quitte
un très grand club pour un autre qui souhaite le devenir à
marche forcée. Quels hommes trouvera-t-il à sa disposition
et surtout, quel chantier mettra-t-il en oeuvre pour permettre à
Chelsea de devenir un grand d'Europe ? Abramovitch semble vouloir aller
vite et Kenyon aura sans doute peu de temps pour tout faire très
bien.
De l'ombre à la
lumière.
Fondé en 1905, et
donc bientôt centenaire, Chelsea ne peut pas se targuer d'avoir un
palmarès grandiloquent. Champion d'Angleterre pour la première
et dernière fois en 1955, détenteur de deux défuntes
coupes des coupes (1971 et 1998), vainqueur de la supercoupe d'Europe en
1998, Chelsea compte également trois "Cups" remportées en
1970, 1997 et 2000 et deux coupes de la ligue (1965 et 1998). Les millions
de Abramovitch suffiront-ils pour permettre au club de changer radicalement
de pallier ? Quoi qu'il en soit, le club londonnien est plutôt bien
engagé en championnat avec deux victoires (dont une très
importante sur le terrain de Liverpool 2-1) et un nul en trois matches
de championnat et devrait sans trop de mal s'extirper de son groupe G de
la Ligue des champions où il affrontera en guest star, les italiens
de la Lazio et deux outsiders accrocheurs avec les rapides et solides tchèques
du Slavia de Prague et les bouillants turcs du Besiktas d'Istambul. Pour
Claudio Ranieri, le challenge est abordable et mener ses troupes en huitièmes
de finale constitue une première étape essentielle de sa
saison, lui, qui n'a pour l'instant pas ressenti de répercussions
de l'arrivée du nouvel homme fort de Sibérie alors que les
recrutements sont allés à un train d'enfer. Bien que le technicien
italien soit conforté dans son poste par Abramovitch, ce dernier
continue de discuter avec Sven Goran Ericksson, l'actuel sélectionneur
suédois de l'équipe d'Angleterre, dans l'optique de le remplacer
à moyen terme. Et à partir de 2004, date de sa fin de contrat
avec la sélection anglaise, Ericksson a déclaré que
tout était possible.
Un recrutement titanesque
Pour parvenir à ses
fins, Abramovitch n'a pas lésiné sur le portefeuille. En
un marché estival, le milliardaire russe s'est délesté
de 110 millions de livres sterlings, soit plus de 170 millions d'euros.
Pratiquement tout ce qui se fait de mieux sur la planète a été
contacté et les propositions les plus folles ont été
avancées : 100 millions pour Raul, qui finalement s'avéraient
être proposés pour Ronaldo (selon la presse espagnole), 78
millions d'euros pour Henry, opérations sans suite...Mais à
pêcher avec un gros bateau muni d'un grand filet, on finit par pêcher
de gros poissons. Pas moins de treize arrivées depuis la prise de
pouvoir de Abramovitch, sont à décompter. Ranieri doit composer
avec un effectif de 34 éléments dont 6 gardiens de buts !
La place dans les buts londonniens va être chaude à garder.
On peut se demander pourquoi Chelsea a recruté Makalamby à
Eindhoven, Marco Ambrosio venu du Chievo Vérone, Neil Sullivan en
provenance de Tottenham et Jurgen Macho de Sunderland...Une chose est sûre,
l'entraînement des portiers de Chelsea ne doit pas manquer d'animation.
Le rayon de la défense
a relativement été préservé et seuls Glen Jonhson
(de West Ham pour un peu plus de 9 million d'euros) et Wayne Bridge (de
Southampton pour près de 11 million d'euros), sont venus rejoindre
Desailly et Gallas portant le nombre de défenseurs a une très
confortable délégation de douze joueurs. En ce qui concerne
les milieux défensifs, Abramovitch s'est offert au prix d'âpres
négociations avec Manchester United et le Real Madrid, Juan Sébastian
Veron (pour 23 millions d'euros) et Claude Makélélé
(pour 24 millions d'euros), deux internationaux de classe mondiale dont
la complémentarité reste néanmoins à prouver,
sans oublier le Camerounais Geremi, débarqué du Real Madrid
pour 10 millions d'euros. En outre, deux nouveaux milieux offensifs ont
posé leurs valises du côté de Stamford Bridge, Damien
Duff, véritable révélation du championnat passé
et nouvel internationnal anglais (9 buts en 23 matches) a été
arraché pour 26,5 millions d'euros à son club des Blackburn
Rovers alors que Joe Cole, jeune espoir du football anglais de 22 ans,
a été recruté pour plus de 10 millions d'euros à
West Ham. Enfin, en attaque, Gudjohnsen et Hasselbaink auront une sacrée
concurrence avec les arrivées du Roumain de Parme, Adrian Mutu (recruté
pour 21,5 millions d'euros), déjà auteur de deux buts en
deux matches avec Chelsea alors qu'il en avait mis 17 dans la Calcio et
de l'international argentin Hernan Crespo, en provenance de l'Inter pour
la somme de 26 millions d'euros. En l'espace d'un été, Abramovitch
espère avoir hissé son club au même niveau que les
meilleurs avec un recrutement sans précédent sur la scène
du football.
Abramovitch, un Russe
ambitieux...
Le milliardaire russe n'a
donc pas lésiné sur les moyens. Son arrivée dans le
championnat anglais a fait couler beaucoup d'encre et pas que sympathique.
Il faut dire que l'homme prête à discussion, sa motivation
et sa faculté à dépenser sans compter là où
tous serrent la vis ou vendent à tout va, peuvent susciter l'envie,
la jalousie et autres sentiments de frustration et d'injustice d'autant
plus que l'origine de sa fortune est floue. Catalogué "Parrain de
Sibérie" par certains, Roman Abramovitch est à 36 ans, à
la tête d'un empire de plus de 5,7 milliards de dollars essentiellement
constitué dans l'environnement du pétrôle, ce qui fait
de lui le deuxième homme le plus riche de Russie. Mais ses relations
passées avec des financiers véreux et de puissants mafieux,
alimentent sa réputation sulfureuse d'enfant des pillages de l'Etat
et des collusions politico-mafieuses des années 90. Mais apparement,
Abramovitch n'a que faire des états d'âme de ses rivaux et
des critiques sur l'origine douteuse de sa fortune. Le nouveau président
de Chelsea se verrait bien remporter le titre de champion dès cette
année alors que Ranieri appelle à la patience, ce qui peut
lui coûter sa place, et il ne se satisfera certainement pas de médiocrité.
Jesper Gronkjaer, l'ailier danois de Chelsea est celui qui semble le mieux
traduire la volonté de son président sur le site Planetfootball
: "Avec le temps, Roman veut que nous atteignons le niveau de
Manchester United (...), en Champions League, nous devrons être en
mesure de concurrencer les grands clubs". Reste à savoir quel
temps souhaite consacrer Abramovitch à son équipe pour réaliser
des objectifs très élevés.
Incontestablement, Chelsea
a la pression sur ses épaules, on ne recrute pas pour plus de 170
millions d'euros de joueurs uniquement pour le plaisir du spectacle, Abramovitch
étant un businessman averti, même si le football est sa passion.
Les stars sont au rendez-vous mais reste à savoir si les enchaînements
viendront vite et si les égos de toutes ces stars seront aussi bien
gérées qu'à Manchester ou à Madrid. Un grand
club se construit aussi en sachant gérer ce type de problématique.
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à cet article - Par Olivier Schvan
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