Deux jours
après avoir amené l'équipe strasbourgeoise, dont il
n'a certes pu éviter la relégation, à une finale victorieuse
de Coupe de France, Yvon Pouliquen a été démis de
son poste d'entraîneur du Racing. Son remplaçant n'est autre
qu'Ivan Hasek, ancien joueur du club également, qui a lâché
le Sparta de Prague pour accepter une offre qu'il avait dû refuser
cet automne.
Après tout, les changements
d'entraîneur à la suite de mauvais résultats sur une
période souvent de courte durée fait assez bondir pour qu'on
puisse louer la cohérence d'un changement d'entraîneur à
l'intersaison. Sauf que Strasbourg a déjà changé de
coach en cours d'exercice avec l'éviction de Claude Le Roy en novembre,
et que Yvon Pouliquen, s'il n'a pas assuré le maintien de l'équipe
alsacienne (qui le pouvait ?), a dirigé à lui tout seul une
campagne de Coupe de France victorieuse, sortant au passage les épouvantails
lyonnais et nantais.
La mésentente avec Proisy
Comme souvent dans ce genre d'affaires,
il y a une sorte de contentieux personnel derrière. Le président
Patrick Proisy a rapidement trouvé que Pouliquen lui posait bien
des problèmes. Tout d'abord car au sortir d'une défaite de
plus à la Meinau, il avait déclaré que sa formation
n'avait pas le niveau de la première division, espérant peut-être
remonter ses troupes mais indiquant plus clairement encore qu'il ne fallait
pas trop compter avec le maintien. Et qu'avec l'effectif qui lui avait
été laissé, il ne pourrait faire des miracles... Déjà,
Proisy avait fait part de son mécontentement dans un entretien accordé
au quotidien sportif L'Equipe.
Au mois de mars, Pouliquen a de plus
commencé à vouloir y voir plus clair concernant son avenir
et la saison prochaine. Et là encore, il s'y est pris par voie de
presse, ce qui a déplu au président : "Quand un entraîneur
communique par presse interposée pour faire passer un message, ce
qu'aucun club ne peut accepter, il ne faut pas s'étonner que certaines
décisions soient prises." Manifestement, la communication était
difficile entre l'ancien joueur du RCS et le président Proisy, initialement
extérieur au football et surtout à Strasbourg, arrivé
en 1997 dans les valises du groupe IMG McCormack. Le public alsacien a
fait son choix : lors de la présentation du trophée conquis
samedi au Stade de France, il a copieusement hué Proisy, tandis
que la Meinau résonnait encore des "Pouliquen, Pouliquen"
entendus au cours de la dem-finale victorieuse contre Nantes. Pouliquen
est annoncé à Grenoble, promu en D2 mais sans entraîneur
depuis que Georges Michel est parti à Saint-Etienne.
La vieille piste Hasek
Néanmoins, Proisy et surtout
le nouveau directeur sportif Marc Keller, ancien pro du club lui aussi,
n'ont pas choisi un inconnu pour le remplacer. Ivan Hasek, ancien international
tchécoslovaque (56 sélections), a passé trois saisons
au RCS (1990/3) après douze ans au... Sparta de Prague, le club
qu'il quitte aujourd'hui après l'avoir mené à un nouveau
titre de champion de République Tchèque. Il y était
sur le banc depuis deux saisons, mais cela fait déjà trois
ans et demi qu'il est l'adjoint du sélectionneur national tchèque
Josef Chovanec, vieux compagnon de route des belles dernières années
du football tchécoslovaque.
Hasek avait été contacté
lors du limogeage de Le Roy en novembre, mais avait refusé, s'estimant
(et étant) lié au club praguois. Mais voici quelques semaines,
il a indiqué, la saison étant terminée, qu'il quittait
le Sparta. Une piste grecque a été évoquée,
mais visiblement l'appel de Strasbourg était la vraie raison de
sa démission. Ce qui explique aussi, sans l'excuser, le silence
de la direction du Racing vis-à-vis de Pouliquen.
Comme Pouliquen (38 ans), Hasek est
un jeune coach (37 ans). Va-t-il, avec le tout aussi jeune directeur sportif
M. Keller, s'occuper de Strasbourg pendant une longue période ?
Va-t-il prendre part à une véritable histoire, à une
véritable progression, après que Proisy a usé cinq
techniciens en quatre ans ? Le Tchèque est en tout cas enthousiaste
: "Le défi que Patrick Proisy et Marc Keller me proposent m'a
séduit, je n'ai pas hésité entre la proposition du
Racing et celles de grands clubs européens."
L'heure du renouveau devra sonner
dès la saison prochaine pour Strasbourg, qui espère une remontée
immédiate, sans doute en bénéficiant du retour de
la D1 à vingt clubs pour 2002/3. La qualification en Coupe de l'UEFA,
issue de la victoire en Coupe de France, permettra peut-être de garder
certains éléments un an, mais pas plus. Hasek a donc une
occasion unique de s'offir un retour dans l'élite et de lancer ainsi
une carrière fructueuse sur le banc alsacien.
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à cet article - Par Yann Peltier
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