Après
trois saisons passées à la tête de l'équipe
rennaise et des résultats un peu stagnants, Paul Le Guen sera bien
écarté de son poste d'entraîneur au profit de Christian
Gourcuff. Ce dernier quitte Lorient pour un club plus ambitieux mais qui
doit maintenant se construire une identité tant par le jeu que par
les résultats.
Il était sur le banc ce que
François Pinault était dans le monde du football : une nouvelle
tête. Lorsque le riche homme d'affaires breton a pris le contrôle
du Stade Rennais voici trois ans, il a souhaité s'appuyer sur un
entraîneur sans aucune expérience pour l'associer à
la renaissance du club. Las, trois saisons de résultats trop peu
en rapport avec les investissements consentis auront eu raison de cette
belle idée. C'est tout de même un autre technicien breton,
bien plus expérimenté celui-là, qui prendra les rênes
de l'équipe rouge et noire cet été : Christian Gourcuff,
qui avait décidé de quitter le FC Lorient après y
avoir assuré une nouvelle montée en D1.
La reconnaissance pour Gourcuff
Gourcuff a signé un contrat
de cinq ans, comme Le Guen avant lui. Le président René Ruello
est satisfait de cette issue : "C'est la fin de la première étape.
L'heure était venue de changer certains hommes mais de continuer
à aller dans la même direction. Il ne s'agit pas d'une révolution
mais d'une évolution. Christian Gourcuff signera mercredi un contrat
de cinq ans et j'en suis très heureux car il avait plusieurs propositions.
Il a choisi Rennes et le football breton car il incarne notre région.
Il sera responsable de toute la partie sportive du club."
Le futur entraîneur de Rennes
n'est pas un inconnu dans le landernau du football. Ses conceptions tactiques
et techniques le rapproche du voisin nantais, au parcours incomparable
ces trois dernières saisons justement (deux coupes de France, peut-être
mieux cette saison) : jeu en mouvement, passes courtes, créativité.
Une idée de jeu qui a permis à un club comme Lorient, qu'on
peut légitimement qualifier de parfaitement déstructuré
avec d'incessantes luttes internes, de monter deux fois en D1, à
l'issue des saisons 1997/8 et 2000/1. Rennes, avec son organisation plus
poussée, est censé être le terrain d'épanouissement
des idées de Gourcuff au plus haut niveau.
La fin d'une aventure pour Le
Guen
Pour Le Guen, cette éviction
est tout sauf une surprise. Son remplacement par Gourcuff était
dans l'air depuis la fin novembre déjà. A l'époque,
le Stade Rennais plus de bas que de hauts, et il avait fallu une improbable
victoire au Parc des Princes (0-1) pour empêcher Ruelle d'annoncer
le limogeage de l'ancien... Parisien. Malgré une belle série
en décembre-janvier et la possibilité de disputer la Coupe
de l'UEFA la saison prochaine en gagnant encore une place en championnats
(Sedan, cinquième, est à trois points devant à deux
journées de la fin), l'homme de Pencran ne sera pas maintenu.
Car le courant ne passe plus entre
l'homme de Pencran et ses dirigeants. Un fait qui s'est cristallisé
en la personne de Bernard Lama. L'influent et médiatique gardien
de but avait déjà pesé de tout son poids cet automne
dans le maintien de son ancien coéquipier parisien en expliquant
très clairement qu'il était venu en Bretagne pour travailler
avec ce dernier. Mais aujourd'hui, la direction rennaise a décidé
d'en finir avec Lama, en ne se montrant spécialement encline à
le garder une deuxième année. Le portier s'est fendu dans
la presse de déclarations fracassantes sur la trahison dont aurait
été victime Le Guen au Stade Rennais, où il ne serait
plus désirable. Les faits ne lui donnent pas totalement tort.
Apparemment, Le Guen s'est néanmoins
vu proposer le poste de manager général, mais il l'a refusé,
comme l'a expliqué Ruello : "Il souhaite rester en prise directe
avec le terrain et le jeu, explique René Ruello. Il estime que ce
changement d'orientation dans sa carrière arrive trop tôt."
Un brin de fierté n'est pas à exclure également.
Les joueurs déçus
Les joueurs sont sans doute déçus
de cette issue, eux qui ont très certainement obtenu des résultats
autour de la trêve hivernale en grande partie par solidarité
avec leur entraîneur. Mais il n'est pas question de contester la
décision prise en haut lieu, à l'image du défenseur
Dominique Arribagé : "C'est un crève-cœur pour tout le
monde. J'ai senti un homme blessé, attaché au club, un homme
qui ne voulait pas mais qu'on forçait à partir. Une chose
est claire, ce n'est pas une démission. Le club veut travailler
avec Christian Gourcuff. Nous, les joueurs, n'avons rien à dire."
En effet, Le Guen avait annoncé
mercredi après-midi à son groupe qu'il avait pris la décision
de quitter son poste à la fin de la saison, mais les dés
étaient déjà jetés. Reste à savoir si
ce mélodrame se révélera une nécessaire crise
de croissance pour le Stade Rennais. Le Guen aura à cœur de mener
son équipe le plus haut possible lors des deux rencontres qui restent
: une place en Coupe de l'UEFA serait le meilleur des barouds d'honneur,
et un beau cadeau à offrir à son successeur.
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à cet article - Par Yann Peltier
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