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La leçon de courage de Monaco
Par Cédric Chapuis - Actu Champion's League, Mise en ligne: le 21/04/2004 à 00h22
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Après avoir été accroché en première mi-temps puis assommé par l'expulsion de Zikos, l'AS Monaco a une nouvelle fois fait plier une constellation de stars grâce à sa folle détermination. Une victoire (3-1) au final qui place les joueurs monégasques en position idéale avant de se déplacer à Londres le 5 mai prochain.

La leçon de courage de Monaco

Les données de la rencontre

Depuis sa qualification héroïque face au Real Madrid (2-4, 3-1) en quarts de finale, l'AS Monaco était bien redescendu de son nuage avant d'affronter Chelsea. Requinqués grâce à la mini-trève due à la finale de la Coupe de la Ligue, les hommes de Didier Deschamps se présentaient avec toutes leurs forces (sauf Squilacci qui se remettait d'un claquage) et toutes leurs ambitions. Pour tous les joueurs monégasques, cette demi-finale était loin d'être une fin en soi. «Se retrouver là n'est pas un rêve de gosse, rappelait Patrice Evra lundi. On a vite oublié Madrid. On n'a pas fait tout ça pour rien. Et même si je ne veux pas évoquer la finale, beaucoup de regrets découleraient d'une élimination.» En effet, impressionnants cette saison, les Rouge et Blanc n'ont aucune assurance de remporter un titre, puisqu'ils sont deuxième en L1 derrière le rouleau-compresseur lyonnais et qu'une demi-finale de C1 n'est évidemment pas considérée comme un sacre. Et comme il est possible de voir les Rothen, Giuly, Evra et autres Prso émigrer en fin de saison, ceux-ci se devaient de prouver qu'ils veulent à tout prix remporter un titre en guise d'adieu. Le prince Albert en personne l'avait rappelé lundi après le dernier entraînement de "ses" joueurs : «Cette saison est fantastique, mais elle ne pourra s'inscrire en lettres d'or dans le livre du football français et de l'ASM s'il n'y a pas de titre au bout. Les joueurs en sont conscients.» Mais ils étaient également conscients qu'affronter Chelsea n'allait pas être une partie de plaisir, loin de là. Car si Monaco voulait faire un premier pas vers Gelsenkirchen, il lui fallait à coup sûr faire preuve de tout son talent collectif.

Du côté londonien, la liste des indisponibles était un peu plus longue (Gallas, Duff) mais lorsqu'on connaît l'ampleur de l'effectif des Blues, on comprenait que Claudio Ranieri ne se faisait pas trop de soucis. D'autant plus que cette saison, son équipe est intraitable à l'extérieur en Ligue des Champions : 5 victoires en 5 matchs (Prague, Lazio, Besiktas, Stuttgart et Arsenal) et un seul but encaissé ! Chelsea se déplaçait donc confiant, enregitrant en outre le retour de Claude Makelele, remis de sa blessure au genou. Cependant, le coach italien de l'actuel dauphin d'Arsenal en Premier League refusait de bercer dans l'optimisme : «Ils ont une bonne équipe, de bons joueurs, quatre formidables buteurs. A gauche, il y a Jérôme Rothen, un ailier fantastique, bon pied gauche, incroyable. A droite, Ludovic Giuly, comme Gianfranco Zola, est un magicien. En somme, une très, très bonne équipe qui joue un football champagne.» Mais les Blues, qui n'avaient plus que cet objectif en tête pour la fin de saison, puisque les Coupes et le championnat ne leur ont pas souri, devaient faire preuve de toute leur concentration pour ne pas connaître le même sort que le Real Madrid.

Les meilleurs moments

- Le début de match est plutôt monégasque, et l'ASM inquiète une première fois les défenseurs anglais, avec une reprise de Morientes contrée par Desailly. Le ballon revient dans les pieds de Rothen, qui voit son centre dégagé en catastrophe par Makelele (10').

- Monaco pousse, et sur un coup-franc consécutif à une faute de Melchiot sur Rothen, ce dernier distille un centre dont il a le secret. Son coup-franc rebondit avant d'atterrir comme par miracle sur la tête de Dado Prso, qui lobe Ambrosio et ouvre le score. Monaco est lancé (1-0, 17').

- Ce but a le don de réveiller les Blues. A peine cinq minutes après l'ouverture du score monégasque, Lampard lance Parker dans la surface. Ce dernier remet sur Gudjohnen, qui glisse mais parvient à servir Crespo, seul à 5 mètres du but de Roma et qui trompe tranquillement le portier italien. Tout est à refaire pour l'ASM (1-1, 22').

- Chelsea pousse, et Lampard (encore lui), après avoir taclé Rothen, centre pour Crespo qui place sa reprise au dessus des cages monégasques (27').

- Monaco est pressé très haut par les Anglais et n'arrive pas à produire son jeu, même si Giuly, lancé dans la profondeur, résiste à Terry et Bridge, mais ne peut assurer sa frappe de l'extérieur du droit qui file directement dans les bras d'Ambrosio (34').

- C'est la mi-temps sur ce score logique de 1-1, puisque chaque équipe a eu une période positive : Monaco jusqu'au premier but et Chelsea jusqu'à la demi-heure de jeu.

- Dès la reprise, le match prend une tournure différente. Cela commence à la 50e minute, où hors de l'action, Marcel Desailly donne un coup de coude à Fernando Morientes, non sanctionné. Il s'en suit une incroyable triple occasion monégasque. Tout d'abord, Dado Prso place sa tête au premier poteau sur un corner de Rothen, parfaitement repoussée par Ambrosio (51'). Ensuite, Morientes, en déséquilibre sur un centre de la gauche, parvient à redresser le ballon, qui est sauvé sur sa ligne par Desailly. Puis Ibarra lance Giuly qui marque, mais le lutin monégasque était hors-jeu (52'). Et pour conclure cette incroyable période de retournements, le Grec Vassilis Zikos réagit bêtement à une provocation tout aussi idiote de Makelele. Sanction immédiate, expulsion pour le milieu de terrain, qui va laisser ses partenaires à dix pendant 40 minutes (53').

- Ce coup du sort redonne le moral aux Anglais, et Gudjohnsen est tout près de donner l'avantage aux siens, mais il est rattrapé in-extremis par Hugo Ibarra. Et sur le corner suivant, le buteur islandais place une tête décroisée qui frôle la lucarne gauche de Roma (57' et 58'). Monaco a laissé passé l'orage, place désormais à la démonstration.

- Alors qu'on croit les monégasques cuits et démotivés par le durcissement du jeu, Ludovic Giuly parvient à lancer Morientes seul sur le côté droit de la surface, et le buteur espagnol envoie un bijou dans la lucarne de Marco Ambrosio. Monaco trompé par l'arbitrage, mais Monaco qui mène désormais face à Chelsea grâce à son joyau ibérique (2-1, 78').

- Le destin se joue parfois à peu de chose. A quelques centimètres près, Shabani Nonda aurait pu éviter le tacle de Pierre-Fanfan en août dernier. A quelques centimètres près, il est arrivé a dévier du bout du pied droit ce centre de Rothen dans les buts des Blues ... sur son premier ballon ! A peine remis de la sortie de Ludovic Giuly, les Anglais encaisse donc le but du K.O. par son remplaçant. Chelsea est assommé (3-1, 83').

- Au coup de sifflet final, le stade Louis II explose de joie après cette magnifique performance de ses joueurs. Mais ces derniers refusent de s'enflammer. «Il reste un match à jouer, mais on a fait un grand pas» déclarait Jérôme Rothen à la fin de la rencontre.

La performance des Monégasques

Une équipe, ça joue ensemble. C'est ce qu'a prouvé l'AS Monaco mardi soir face à Chelsea. L'équipe de Didier Deschamps a montré beaucoup de combativité dans ce match, et, rien que pour ça, la victoire ne devait pas leur échapper. La défense Rouge et Blanche, bien que dépassée sur plusieurs coups d'accélérateurs londoniens, a une fois de plus assuré, notamment sur les côtés, où Ibarra et Evra ont réalisé un match énorme. Comme à leur habitude, les travailleurs de l'ombre Bernardi et Zikos (jusqu'à son expulsion) ont fait leur (bon) travail, tout en apportant le surnombre en attaque à plusieurs reprises. Et comme en défense, la plus grosse satisfaction du milieu reste les ailiers Rothen et Giuly, qui ont su déstabiliser leurs adversaires directs et apporter un danger permanent sur le but adverse. Ainsi, l'attaque de la Principauté a pu terminer le travail, puisque les trois buteurs alignés (Prso, Morientes et Nonda) ont marqué, avec au passage deux passes décisives de Rothen et une de Giuly. Les combinaisons sur les ailes ont été le premier facteur de danger pour la défense de Chelsea, notamment sur le côté gauche, où Evra et Rothen se sont régalés à mettre hors de position leurs adversaires.

On l'a compris, difficile de dégager un seul homme du match côté monégasque. Cependant, on a si souvent cité Evra, Rothen et Giuly, encore excellents mardi soir, qu'il serait bon de rendre cette fois ci hommage à Hugo Ibarra. Barré pendant une bonne partie de la saison par Gaël Givet au poste de latéral droit, le défenseur argentin a su profiter de sa deuxième chance il y a quelques mois pour définitivement s'imposer comme le parfait pendant de Patrice Evra, même s'il est un peu moins porté vers l'attaque. Ibarra a beaucoup couru en première période derrière Jesper Gronkjaer, mais la sortie de ce dernier a ensuite facilité son engagement dans la partie, puisqu'il est avec Evra le Monégasque à avoir touché le plus de ballon ! Mais s'il y a un autre homme à sortir de cette rencontre riche en rebondissements, c'est sans doute Fernando Morientes. L'attaquant espagnol a montré une telle hargne dans ce match que son but libérateur n'est qu'une juste récompense personnelle et collective. Car si Monaco l'a emporté, c'est encore une fois grâce à son collectif auquel adhèrent tous les joueurs.

La performance des Londoniens

Chelsea a sans doute le sentiment d'être passé à côté de quelque chose mardi. Car au vu leur performance collective, une défaite 3-1 peut paraître exagérée. Mais les Blues n'ont pas su saisir les opportunités qui se présentaient à eux. En effet, dès qu'ils ont encaissé le premier but, on a eu l'impression que cette équipe jouait ensemble depuis plusieurs années tant les enchaînements étaient fluides et déstabilisaient la défense adverse. On l'a surtout vu en première mi-temps, avec une défense rassurante à plusieurs reprises, un milieu de terrain extrêmement travailleur, réalisant un pressing très efficace lors de la remontée de ballon des Monégasques et une attaque présentant un danger permanent grâce aux renards que sont Gudjohnsen et surtout Crespo. Mais après l'expulsion de Zikos et malgré l'entrée de Jimmy Floyd Hasselbaink, le jeu des Blues n'a plus été aussi précis, et le pressing a été quasiment abandonné. Chelsea s'est sans doute cru maître de son fait et n'a pas pensé au sursaut d'orgueil monégasque. C'est là que se situe sans soute l'erreur londonienne.

Individuellement, plusieurs joueurs ont su tirer leur épingle du jeu. Si on pouvait s'attendre à une belle performance de Makelele (hormis quelques gestes anti-sportifs, notamment celui de la 53e minute) ou de Lampard, peu auraient misé sur Eidur Gudjohnsen. C'est pourtant l'attaquant islandais qui a le plus pesé sur la défense française. Sa combativité et ses déplacements ont considérablement gêné ses adversaires, et Gudjohnsen aurait sans doute mérité mieux sur cette rencontre. Hormis le grand blond, les meilleurs Londoniens ont sans conteste été Claude Makelele et Franck Lampard. Le récupérateur français a été de toutes les batailles du milieu de terrain, et a récupéré (comme à son habitude) un nombre incalculable de ballons. Il convient tout de même de mettre un bémol à la prestation de Makelele, tant son attitude sur l'altercation avec Zikos ne lui ressemble pas et doit être sans lendemain. Son compère Franck Lampard, véritable poumon de Chelsea comme l'est Vieira à Arsenal, a été fidèle à lui-même, alternant interventions défensives efficaces et participations offensives productives. Peu d'autres Blues ont émergé de ce match, puisqu'on a l'impression qu'ils se sont arrêté de jouer à fond après le carton rouge adressé à leur adversaire. A noter que Marcel Desailly aurait mérité un carton rouge sur son coup de coude sur Fernando Morientes.

Mais où s'arrêteront-ils ? Après une telle performance face à une équipe qui avait gagné tous ses matchs à l'extérieur depuis le début de la compétition et n'avait encaissé qu'un but hors de ses bases, les joueurs de l'AS Monaco ont prouvé qu'une finale de Ligue des Champions était largement à leur portée. Et la principale arme de Monaco, c'est le coeur, comme l'a souligné Didier Deschamps après le match : «C'est un super résultat. Les joueurs ont été formidables, ils sont allés chercher cette victoire avec leur coeur et des ressources au fond d'eux-mêmes qu'ils ne soupçonnaient peut-être même pas.» Et qui soupçonnait l'ASM capable de décrocher sa place pour Gelsenkirchen en début de saison ?


Fiche Technique

AS Monaco 3-1 Chelsea FC (1-1)

Stade Louis II (Monaco)
Spectateurs : 18 500
Arbitre : M. Meier (Suisse)
Buts : Prso (17'), Morientes (78'), Nonda (83') pour Monaco ; Crespo (22') pour Chelsea
Avertissements : Ibarra (44') pour Monaco ; Melchiot (16'), Makelele (53'), Terry (72') pour Chelsea
Expulsion : Zikos (53') pour Monaco

Monaco : Roma - Ibarra, Rodriguez, Givet, Evra - Giuly (Nonda 83'), Bernardi, Zikos, Rothen (Plasil 88') - Morientes, Prso (Cissé 57')
Chelsea : Ambrosio - Melchiot (Hasselbaink 62'), Terry, Desailly, Bridge - Parker (Huth 69'), Makelele, Lampard, Gronkjaer (Veron 46') - Crespo, Gudjohnsen



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