Zenit : grandeur sans lumière
Tombé de son piédestal après six titres consécutifs et soutenu par Gazprom, le Zenit a longtemps régné sans partage. Mais depuis l'exclusion des Coupes d'Europe en 2022, la lumière est moins forte. Le club reste puissant, mais avance sans vitrine ni éclat, dans un championnat redevenu compétitif.

La Russie a un nouveau roi. Après six saisons sans partage face à ses rivaux de la capitale, le Zenit est enfin tombé de son trône. L'identité du souverain pour les mois à venir ? Le FK Krasnodar, titré pour la première fois de son histoire. Battu d'un petit point, le club basé à Saint-Pétersbourg, soutenu par Gazprom, a vu sa parenthèse dorée se refermer brutalement.
Aujourd'hui, l'argent coule toujours, mais la vitrine européenne est fermée à double tour depuis février 2022 — l'UEFA a prolongé l'exclusion «jusqu'à la résolution du conflit» et déjà signifié qu'aucun club russe ne reviendrait sur la scène continentale avant 2026. Dans cette impasse, les dirigeants ont une ambition : reconquérir le trône national pour se présenter prêt le jour où l'Europe rouvrira la porte.
Une couronne à reconquérir
La perte du titre a d'abord ébranlé une identité bâtie sur six championnats consécutifs. Le président du directoire, Alexandre Medvedev, a exigé «récupérer la première place dès 2025-2026» , alors que la Coupe de Russie a été récupérée par le CSKA Moscou. En interne, le traumatisme est réel. Le Zenit avait construit son hégémonie sur une stabilité rare en Russie, un effectif soudé, un entraîneur durable présent depuis 2018. La défaite face à Krasnodar a montré des fissures dans ce modèle, entre un banc moins profond, une dépendance accrue à Malcom — parti à Al Hilal à l'été 2023 — et une défense vieillissante.
emplacement publicitaire
Pour Sergeï Semak, confirmé sur le banc, l'heure n'est plus à la gestion tranquille. La réalité, c'est que le championnat russe bouge. Krasnodar s'affirme, le Spartak et le Dynamo renaissent à Moscou, et des clubs comme le FK Rostov ou le Rubin Kazan n'ont plus peur de bousculer l'ordre établi. Longtemps seul au sommet, le Zenit se découvre vulnérable, sans l'aura européenne pour compenser, sans l'avance psychologique d'hier. Vestiaire usé par le confort, environnement devenu plus exigeant, le spectre d'une chute rôde au-dessus de la Gazprom Arena. La solution ? Dépenser pour injecter du sang neuf.
Marché de surenchère, attraction en berne
L'argent ne manque pas : le Zenit a posé 30 M€ sur Richard Rios, 25 M€ sur Wesley França et offert un confortable salaire à Tammy Abraham. Tous trois ont dit non. L'Anglais a préféré Besiktas, avec un salaire annuel à 7 M€ — le combo Istanbul et Ligue Europa l'a logiquement emporté sur l'exil russe. Le Colombien, lui, n'en démord pas : il veut l'AS Roma, quitte à accepter l'offre inférieure de 24 M€ que Palmeiras juge insuffisante. Même partition pour le Brésilien : accord personnel avec la Louve, Flamengo presse pour Saint-Pétersbourg, mais le latéral rêve des soirées européennes avec Gian Piero Gasperini.
Ces refus mettent en lumière les nouvelles limites du Zenit. Offrir davantage ne suffit plus quand la scène européenne disparaît des perspectives de carrière. Le club peut bien proposer des salaires 20 à 30% plus élevés que ceux pratiqués en Serie A ou en Süper Lig, gonfler des indemnités de transfert majorées de plusieurs millions, et assurer un statut de titulaire incontestable... Rien ou presque ne compense l'absence de vitrine continentale. Aujourd'hui, la promesse d'exposition pèse plus que le chèque à la signature. Et c'est là que le Zenit se heurte à une double peine : devoir surpayer pour recruter, sans pouvoir espérer revendre au prix fort.
Le pari sud-américain et le compte à rebours
Faute d'attirer des noms ronflants comme par le passé (Hulk, Garay, Witsel, Paredes, Marchisio, Ivanovic), la cellule de recrutement s'est tournée vers l'Amérique du Sud. Gerson, acheté à Flamengo pour 25 M€, devient la clef de voûte du milieu. Luiz Henrique, extirpé de Botafogo dès janvier pour 35 M€, incarne la fougue du projet, tout comme Roman Vega, recruté pour 7,7 M€ chez les Argentinos Juniors. L'idée ? Séduire des talents qui n'ont pas encore goûté aux lumières européennes avec la promesse de s'envoler lorsque les portes de l'UEFA se rouvriront dans un avenir proche.
Mais le temps joue contre Saint-Pétersbourg. Si l'embargo se prolonge au-delà de 2026, le modèle risque l'asphyxie : salaires gonflés sans recettes continentales, valeur marchande limitée, et tentation croissante pour les cadres (Wendel, Pedro, Claudinho, Barrios) d'aller voir ailleurs. D'ici là, le Zenit doit gagner tout, tout de suite, pour garder la flamme et convaincre qu'il redeviendra, un jour, la vitrine qui faisait rêver, notamment après le sacre en Ligue Europa en 2008 avec Andrei Arshavin. Entre nostalgie de l'âge d'or et réalités géopolitiques, le club marche sur une ligne fine : assez riche pour surenchérir, pas assez visible pour séduire.
Quel avenir pour le Zenit ? Les clubs russes vont-ils prochainement retrouver l'Europe ? N'hésitez pas à réagir et à débattre dans la zone «Ajouter un commentaire» ...