Après un début de saison raté, les dirigeants du RC Strasbourg ont dû procéder au remplacement d'Antoine Kombouaré par Jacky Duguépéroux à la tête de l'effectif alsacien. Depuis quelques rencontres, les Ciel et Blanc offrent un nouveau visage. Feu de paille ou véritable redressement ?

Un début de saison catastrophique

Le club alsacien avait vécu une saison 2003-2004 très contrastée : après une première partie de championnat prometteuse, les joueurs d'Antoine Kombouaré s'étaient effondrés pour finalement n'assurer leur maintien que lors des dernières journées de compétition. Avec 43 points, les Strasbourgeois finissaient 13èmes, 5 points seulement devant la zone rouge. Cette deuxième moitié de saison laborieuse trouvait en partie son origine dans le départ de Danijel Ljuboja au PSG lors du mercato. Privée de son meilleur élément, la formation d'Antoine Kombouaré n'était plus parvenue à proposer un jeu aussi spectaculaire qu'en début d'exercice. A ce départ s'ajoutaient ceux de Fabrice Ehret, Corentin Martins ou Pontus Farnerud, conclus durant l'été, ainsi que la blessure du gardien Richard Dutruel, indisponible pour un an. Pour espérer repartir de l'avant, il fallait compenser les absences de ces joueurs-clés. La venue la plus significative de l'été du côté de l'Alsace fut celle de Mickaël Pagis, en provenance de Sochaux. Attaquant technique et expérimenté, ancien «meilleur joueur de D2» , Pagis doit faire oublier aux supporters de Strasbourg la crête peroxydée de Ljuboja. Les gardiens de but Rémy Vercoutre et Stéphane Cassard ont aussi fait leur apparition chez les Ciel et Blanc, pour pallier la blessure de Dutruel. Pascal Johansen faisait son retour à La Meinau après son passge à l'OM. Enfin, le Tunisien Karim Hagui et l'Ivoirien Arthur Boka sont arrivés du côté de La Meinau pour renforcer un secteur défensif défaillant l'an dernier.

Le RCS commence mal la saison en étant défait à Bastia pour son premier match dans ce championnat 2004-2005. La deuxième journée verra une désillusion encore plus grande : Strasbourg encaisse un sévère 4-1 sur son terrain face à Toulouse. Au soir de la 9ème journée, Christian Bassila et les siens sont derniers du championnat avec à leur actif 5 défaites et 4 matches nuls pour aucune victoire. Avec 16 buts encaissés, leur défense est la pire de L1. L'attaque n'est pas brillante non plus puisqu'elle n'affiche que sept buts au compteur. Un exemple illustre bien la mauvaise passe de l'équipe : le Sénégalais Mamadou Niang, 9 buts la saison dernière, a perdu son efficacité et ne parvient plus à transformer ses occasions. Ses dirigeants l'envoient même subir une cure de remise en forme. Bref, le club semble au fond du trou. Le président Edon Gindorf et le manager général Marc Keller vont alors prendre la décision de se séparer d'Antoine Kombouaré et de le remplacer par Jacky Duguépéroux, jusqu'ici en charge du recrutement et de l'équipe réserve. Le 4 octobre, celui-ci est officiellement nommé à la tête de l'effectif pro du RCS. Une décision difficile, car on sait que Keller et Kombouaré étaient assez proches et avaient pris l'habitude de travailler de concert. Le premier match de l'ère Duguépéroux débute par un déplacement à Ajaccio. Les Alasciens en reviennent avec un point en poche, presque une déception puisqu'ils ont mené deux fois au score avant de se faire rejoindre. Mais, comme un symbole, Niang a inscrit son premier but de la saison. Le réveil est proche...

L'effet Duguépéroux ?

La réception de Nice, lors de la 11ème journée, va être le véritable déclic strasbourgeois. Grâce à des buts de Deroff, Pagis et Arrache, le RCS va l'emporter 3-1 et livrer une performance encourageante. Depuis, même si les coéquipiers de Michaël Pagis peinent en déplacement face aux grosses cylindrées du championnat (défaite à Lyon 1-0 puis à Marseille 2-0), le bilan comptable s'est nettement amélioré. Les Ciel et Blanc ne perdent plus à domicile, où ils ont enchaîné trois probantes victoires contre Nice (3-1), donc, mais aussi Bordeaux (1-0) et l'AJ Auxerre (3-1). A Lille dimanche dernier, Duguépéroux a récupéré son premier point à l'extérieur. Un progression qui s'accompagne d'une amélioration nette du jeu alsacien. Lors des sept dernières recontres, Niang et les siens ont marqué 10 buts, soit trois de plus que lors des neuf premières journées. Le retour en forme de Niang, auteur de ses trois premières réalisations à Ajaccio, Lille et contre Auxerre, permet au club de bénéficier d'une doublette d'attaque complémentaire alliant la technique de Pagis à la vitesse de l'international sénégalais. La défense se porte mieux, elle aussi. Certes, huit buts pris depuis la 11ème journée, cela n'a rien de flatteur. Mais c'est tout de même mieux qu'en début de saison. Aujourd'hui, le Racing pointe à la 18ème position du classement de L1, dans la zone de relégation. Néanmoins, il a gravi deux places et n'est plus qu'à un point de Bastia, premier non-relégable.

Quels changements Duguépéroux a-t-il apportés ? En général, on parle «d'effet» lorsqu'un léger frémissement vient agiter la courbe de points d'une équipe. Mais le redressement d'un club, comme sa chute, ne peut être imputé à une seule personne. Du reste, d'un point de vue tactique, Duguépéroux s'inscrit dans la continuité de son prédécesseur. Strasbourg évolue le plus souvent en 4-4-2. Au vu des ses bonnes prestations, Stéphane Cassard, qui a pris la place de Remy Vercoutre après que celui-ci se soit blessé, ne semble plus devoir quitter les cages alsaciennes. Devant lui Duguépéroux aligne une défense à quatre généralement composée de Devaux et Kanté dans l'axe, et de Deroff et Boka sur les ailes. Bassila et Johansen sont positionnés à la récupération, Arrache et Abdessadki se chargeant de déborder les défenses adverses et de servir le duo Niang-Pagis. Au gré des indisponibilités, Lacour et Camadini au milieu ou Farnerud en attaque honorent quelques titularisations. Le onze type ne diffère pas énormément de celui de Kombouaré. Duguépéroux a bien tenté de lancer un jeune, Sidi Keita, 19 ans, mais celui-ci a écopé de deux mois de suspension après avoir blessé le capitaine lyonnais Claudio Caçapa lors de la 12ème journée. C'est donc au niveau mental que l'arrivée d'un nouvel entraîneur s'est faite sentir. Le technicien alsacien le reconnaît lui-même à son arrivée aux commandes de l'équipe : «Mentalement, les joueurs ne sont pas bien (...). Mon boulot consiste à les convaincre qu'ils peuvent traiter d'égal à égal avec beaucoup d'équipes» . Les rapports entre l'effectif du RCS et l'ancien joueur du PSG s'étaient compliqués. Duguépéroux a apporté du changement et de la nouveauté, ingrédients essentiels à la renaissance d'une équipe. «Quand les joueurs sont fragiles dans la tête, explique le nouveau coach, il suffit de pas grand-chose pour les déstabiliser ou au contraire les relancer.»

Un renouveau qui attend confirmation

L'embellie strasbourgeoise se prolongera-t-elle suffisamment pour permettre aux coéquipiers de Kanté de quitter de la zone de relégation ? Rien n'est moins sûr. Même si les résultats se sont améliorés, comment savoir s'ils ne sont pas juste le fruit de l'électrochoc provoqué par le changement d'entraîneur ? Jacky Duguépéroux le reconnaît lui-même : «pour moi, c'est du court terme» déclarait-il récemment dans les colonnes de «L'Alsace» . Or c'est avec une progression sur la durée et non un feu de paille que les Ciel et Blanc parviendront à s'en sortir. Du reste, la défense connaît encore quelques errances. Avec 24 buts encaissés, l'arrière-garde alsacienne est même la pire de Ligue 1. Ce secteur constitue le point faible de l'équipe. Il devra absolument se bonifier, sous peine pour Pagis et les siens d'aller au devant de nouvelles désillusions. Autre problème, les Strasbourgeois n'ont toujours pas remporté le moindre match à l'extérieur cette saison. Leurs trois succès sont intervenus alors qu'ils évoluaient sur la pelouse de la Meinau. Le Racing doit se montrer plus efficace en terre adverse s'il veut assurer son maintien.

Les raisons d'espérer sont toutefois nombreuses : après trois succès d'affilée à domicile, le Stade de La Meinau inspire désormais la méfiance, sinon la crainte, aux équipes qui s'y déplacent. D'autant plus que deux de ces victoires ont vu les coéquipiers de Kanté marquer 3 buts à leurs adversaires, face à Auxerre et Nice. Avec 11 but inscrits, le bilan offensif des Alsaciens chez eux est très honorable. Autre raison d'espérer, les performances actuelles du club sont réalisées en l'absence de nombreux titulaires. Parmi eux on trouve Ulrich Le Pen, qui n'a plus porté le maillot du Racing depuis le déplacement à Ajaccio de la 10ème journée. Les passes décisives et les buts du meilleur joueur de l'équipe la saison passée font assurément défaut aux Strasbourgeois. Au sujet de sa blessure, les médecins du club expliquent qu'elle est «en phase de réhabilitation mais Ulrich ne pourra finalement pas reprendre avant la trêve» . Le Tunisien Hagui, 20 ans, est également indisponible. Absent depuis le début du mois d'octobre, il devrait être opérationnel dans les prochains jours. Jacky Duguépéroux attend leur retour avec impatience, lui qui déclarait il y a quelques semaines : «A la trêve il faut qu'on ait recollé aux équipes qui sont un peu devant. A ce moment-là, on récupèrera du monde et j'espère qu'on démarrera un nouveau championnat.»

Depuis l'arrivée de Jacky Duguépéroux à Strasbourg, la confiance est revenue et avec elle les bons résultats. Si l'équipe conserve quelques faiblesses, notamment en défense, elle offre tout de même des prestations encourageantes et peut à nouveau rêver du maintien. C'est peu, mais c'est déjà énorme : il y a quelques semaines encore, cet objectif semblait inaccessible.