L'OM croyait en ses chances l'été dernier, recrutant des joueurs confirmés (Luyindula, Pedretti, Déhu, Lizarazu) pour compenser le départ de Didier Drogba. Seulement l'irrégularité et le final plus que mauvais des Olympiens leur ont fait perdre tout espoir de Ligue des Champions, les plongeant même en Intertoto. Bilan d'un club que sérénité et continuité ne sont pas prêts de définir.

« La plus belle équipe à Marseille depuis 10 ans. » Voilà ce qu'avait promis Christophe Bouchet aux supporters l'été dernier. Avec les arrivées de Pedretti ou Déhu, en juin, on pouvait le croire. Mais voilà, Didier Drogba et Mathieu Flamini, les deux hommes sur lesquels voulait s'appuyer José Anigo, sont partis pour Londres et Costa, Luyindula, Lizarazu et Fiorèse n'ont pas réussi à les faire oublier, loin de là. Très irrégulier, l'OM a certes tutoyé les sommets du championnat à quelques moments (leader après la 2e journée, puis dauphin de Lyon en février-mars), mais n'a pas réussi à faire abstraction du climat délétère autour du club. Les joueurs, laissant leur caractère au vestiaire, ont terminé le championnat par 9 matchs sans victoire, chutant à la 5e place. Loin de la Ligue des Champions, Marseille jouera l'Intertoto l'an prochain.

Du rêve au néant

Le début de championnat des Marseillais présentait un calendrier favorable, puisque les Olympiens débutaient par deux rencontres à domicile, face à Bordeaux et Lille. Et après deux victoires (1-0 et 3-0), voilà l'OM leader du championnat ! Le départ de Drogba semble digéré, mais sur les quatre buts inscrits par les joueurs de José Anigo, trois l'ont été pendant les arrêts de jeu. On ne s'enflamme donc pas du côté de l'OM, et on a raison. Car les premiers couacs arrivent. Deux défaites consécutives face à Metz et Sochaux, puis quelques victoires acquises sans la manière et les supporters crient leur colère. Mais le premier vrai tournant intervient en novembre, quand Marseille perd deux fois en trois jours face au PSG (1-2 en championnat, 2-3 au Vélodrome en Coupe de la Ligue), une fois à 11 contre 10 et une fois après avoir mené 2-0. C'en est trop pour Anigo, qui préfère démissionner. Demande refusée puis acceptée deux semaines plus tard après un revers à Ajaccio (0-2). Philippe Troussier prend les commandes, pour une victoire, une défaite et un match nul avant la trève.

Et l'OM attaque 2005 par une humiliation au Vélodrome en Coupe de France face à Angers (2-3), considérée par le capitaine Barthez comme une « faute professionnelle » . Mais ce revers précède une impressionnante série de 6 victoires en 7 journées ! Les Phocéens font notamment chuter Lille chez lui pour la première fois de la saison. Cette série permet aux Marseillais de se positionner à la 2e place du championnat et de croire en un retour sur le leader lyonnais. «Tant que mathématiquement, on pourra les rattraper, c'est clair qu'on pensera au titre de champion. Rien n'est perdu » déclare même Benoît Pedretti au lendemain de la victoire à Bastia (1-0). Ensuite, que s'est-il passé ? Incapables de montrer le moindre signe de fierté et d'honneur, Marseille ne remporte qu'un seul petit match lors des 12 dernières journées, terminant sa saison par 9 rencontres sans victoire. L'OM perd donc successivement sa 2e, sa 3e, puis sa 4e place au classement. Et la fin de championnat a été tendue, certains joueurs fustigeant l'attitude d'autres. « On a de la qualité mais on n'a pas envie de courir ensemble, estimait Benoît Pedretti après la défaite face à Caen lors de la 35e journée. J'en ai parlé aux joueurs concernés : en jouant comme ça, en faisant si peu d'efforts, on ne peut pas prétendre à gagner des matchs. » Marseille termine donc 5e, à 24 points de Lyon, et disputera la Coupe Intertoto à partir du mois de juillet.

Les satisfactions : Beye et Barthez bien seuls

Évidemment, les satisfactions sont peu nombreuses dans une équipe qui a sombré en fin de championnat. On peut tout de même noter que la défense marseillaise a eu quelques bonnes périodes, notamment entre la 6e et la 12e journée, où Barthez et ses compères n'ont encaissé que 3 buts. Barthez, justement, a été fidèle à lui-même, c'est à dire présent et efficace comme à son habitude. Même après l'épisode du crachat, le portier phocéen a répondu présent. Il a sauvé plusieurs fois son équipe par des arrêts décisifs (face à Toulouse et à Metz notamment). Et le gardien des Bleus a été bien aidé par Habib Beye. Le défenseur sénégalais a réalisé la meilleure saison de sa carrière, positionné à droite de la défense centrale marseillaise. Incontestablement, c'est le meilleur joueur de l'OM cette année, et c'est d'ailleurs le joueur qui a été le plus utilisé en championnat (37 matchs). Beye a su allier technique et physique, et a fait office de rempart infranchissable a de nombreuses occasions. Son duel mémorable face à son pote Danijel Ljuboja (OM-PSG, 31e j.) en a été la meilleure illustration.

Au milieu de terrain, Marseille peut en premier lieu remercier Laurent Batlles, son homme providentiel. Grâce à ses buts décisifs, il a offert 6 points à son équipe, face à Bordeaux (1-0, 1e j.), Bastia (1-0, 8e j.), Istres (1-1, 27e j.) et Paris (1-1, 31e j.). Le Vélodrome en a d'ailleurs fait un de ses chouchous, et savent ce qu'ils doivent à l'ancien Bastiais. Mais la nouvelle idole des Marseillais est bien sûr Samir Nasri, à peine 18 ans mais qui a porté le jeu de son équipe à bout de bras pendant plusieurs mois avant de baisser physiquement. La technique du jeune Marseillais a donné le sourire au jeu de l'OM, et sa bonne forme, en janvier-février, a coïncidé avec l'excellente série olympienne (6 victoires en 7 journées). Mais Nasri ne s'enflamme pas après sa première (bonne) saison parmi l'élite : « J'ai été comme l'équipe, explique le jeune milieu de terrain. J'ai eu des hauts et des bas. On a tous été plus ou moins fatigués et le jeu de l'équipe s'en est ressenti. » Benoît Pedretti, Frédéric Déhu et Habib Bamogo ont également été assez bons, mais seulement par intermittence. Ces trois joueurs sont certainement capables de faire mieux que ce qu'ils ont montré cette saison, mais auront-ils le temps de le prouver ?

Les déceptions : transferts coûteux pour rendement faible

Le jeu ! Même quand Marseille gagnait, les supporters réclamaient un jeu plus fluide. Samir Nasir a beau avoir apporté un plus, à 18 ans, et même avec un tel potentiel, on ne peut pas tout faire. C'est donc la circulation au milieu du terrain qui peut être décriée, d'autant que Anigo puis Troussier n'ont pas réussi à établir une véritable équipe type. Mais même quand le ballon arrivait dans la surface de réparation adverse, rien n'était gagné. En effet, les attaquants de l'OM n'ont vraiment pas passé une bonne saison. 47 buts inscrits en 38 rencontres, c'est certes le 6e meilleur total de L1, mais c'est bien peu quand on s'appelle Marseille. Le réalisme a trop souvent fait défaut aux Marseillais cette saison pour espérer viser plus haut.

Recruté pour 12 millions d'euros après le départ de Didier Drogba, Peguy Luyindula a erré comme une âme en peine à la pointe de l'attaque marseillaise. On était en effet loin, du Luyindula version OL 2003-2004. Cette saison, l'attaquant international français a inscrit 10 buts, mais a été inexistant à plus d'une reprise, et la réussite n'était vraiment pas avec lui. Même constat pour Eduardo Costa. Le milieu de terrain brésilien, venu à l'OM avec une grande ambition, s'est complètement ramassé. Son rendement dans l'entrejeu marseillais n'a vraiment pas été convaincant pour un joueur qui régalait les supporters bordelais même si son comportement était limite. Costa a pourtant eu la confiance des deux coaches de l'OM, jouant 30 rencontres, toutes en tant que titulaire. On attend donc beaucoup mieux de lui la saison prochaine. Steve Marlet, lui, a été trop irrégulier pour pouvoir vraiment apporter un plus à l'équipe. Aligné en pointe, il a été actif mais peu efficace… Autres grosses déceptions de la saison olympienne, Bixente Lizarazu, qui n'a été que l'ombre de lui même, timide, très peu solide, avant de renaître avec la Bayern, et Fabrice Fiorèse, dont le transfert événement le 31 août a été suivi d'un vide total durant neuf mois. Il est vrai que l'ancien Parisien n'arrivait pas en terrain conquis, mais il n'a vraiment rien apporté sur son côté droit, sauf lors de la 38e journée (un but et une passe décisive à Bordeaux). Un peu tard… Pendant de Fiorèse sur le côté gauche, Bruno Cheyrou a aussi peiné, et lorsque les deux ailes ne fonctionnent pas (les duos Ferreira-Fiorèse, Ferreira-Koke, Cheyrou-Lizarazu ou Olembe-Batlles ont tous échoué), il est difficile de faire du jeu.

La saison prochaine : à quand la stabilité ?

Malgré cette saison plus que décevante, les Marseillais gardent une chance de jouer l'Europe en 2005-2006. Ils se sont en effet inscrits pour la prochaine Coupe Intertoto et pourraient jouer l'UEFA. Mais avant de nourrir une quelconque ambition sur le plan national ou européen, il faudra créer une stabilité dans l'organigramme du club. Pape Diouf et Louis Acariès se sont en effet trop souvent tirés dans les pattes à coup de « Le patron du sportif, c'est moi et personne d'autre » (Diouf) et de «Je suis le censeur. Les gens en place doivent me rendre des comptes. Quand Pape Diouf dit qu'il n'a pas de comptes à me rendre, il a le droit mais il se trompe.» (Acariès). Toutes ces tensions autour du club doivent donc disparaître, mais ce n'est pas gagné, Diouf (président) et Anigo (directeur sportif) n'étant pas sur la même longueur d'ondes. Le seul à être vraiment lucide sur ce sujet a été Philippe Troussier : «De toute façon, les entraîneurs c'est comme les cocus, ce sont les derniers à être informés.» Exit Troussier, bienvenue Fernandez, mais rien n'est encore officiel.

Et l'entraîneur du FC Metz a beau connaître le club pour y avoir officier au début des années 90, la tâche sera rude, car les cadres pourraient quitter le navire. Pedretti serait ainsi très proche de Lyon, et Habib Beye aurait des touches en Angleterre. Steve Marlet, lui, ne sait pas trop quoi penser alors que son prêt se termine. Il pourrait signer définitivement, mais encore une fois, l'instabilité l'inquiète. «Tout ça ne me donne pas envie de fuir, mais ça ne me donne pas envie de rester» déclarait-il récemment. Côté arrivées, Wilson Oruma s'est engagé pour trois ans et renforce le milieu de terrain. Mamadou Niang pourrait l'imiter, de même que Franck Ribery, l'ancien feu follet de Metz parti à Galatasaray. Tout cela est conditionné par la signature de Jean Fernandez, et tant qu'elle ne sera pas intervenue, cela bloquera le mercato de l'OM, qui cherchera également un attaquant d'envergure (Koller, Kezman). Et il faudra que la mayonnaise prenne, contrairement à cette année…

Un été honorable, un automne meurtrier, un hiver prolifique et un printemps qui a fait perdre toutes ses illusions au club, l'OM a tout connu cette saison, sauf la continuité. Entre une équipe qui ne fait preuve d'aucun amour propre et des dirigeants qui se tirent dans les pattes, Marseille ne pouvait viser mieux que cette cinquième place, qui préserve un léger espoir d'Europe. Mais l'an prochain, les supporters phocéens attendent, sinon des résultats faramineux, un état d'esprit et un jeu qui permettent de viser haut. Sinon, on effacera tout et on recommencera. Encore.

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