Mercato : Troyes, un modèle... spécial
Depuis son rachat par le City Football Group en 2020, l'ESTAC incarne un paradoxe déroutant. Jamais le club aubois n'a autant vendu de joueurs, ni généré autant de recettes. Et pourtant, jamais sa situation sportive n'a semblé aussi fragile.

Plus de 80 M€ engrangés en cinq ans, un réseau mondial pour booster les transferts, un centre de formation modernisé... Sur le papier, l'ESTAC coche toutes les cases d'un projet ambitieux.
Mais la réalité est plus terne : une descente et un sauvetage in extremis sur les cinq dernières saisons, un effectif constamment remodelé, une masse salariale parmi les plus faibles de L2. Le club est loin d'assumer son statut de locomotive, malgré les indicateurs flatteurs du trading.
Le turbo du City Group... et ses limites
Savinho à 25 M€ en 2024 (sans avoir joué un match à Troyes !), Wilson Odobert à 12 M€ en 2023, Giulian Biancone à 10 M€ en 2022, Cyriaque Irié à 8,5 M€ en 2025 : Troyes vit depuis 2020 une explosion de sa capacité à vendre. Mieux, certaines recettes échappent même aux radars officiels : les 9,4 M€ récupérés via la clause de revente de Bryan Mbeumo, transféré à Manchester United pour 83,5 M€, ou les 5 M€ pour Metinho à Bâle en témoignent. Cette manne, Troyes la doit avant tout à l'effet réseau du CFG, capable de survaloriser un joueur par simple jeu d'alliances internes ou d'exposition maîtrisée.
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Mais derrière le décor globalisé, le modèle reste bancal. L'ESTAC achète peu, vend beaucoup, et surtout... ne retient personne. En cinq saisons, aucun joueur clé n'a été conservé plus d'un an par les dirigeants aubois. Le projet sportif local est relégué au second plan. Priorité au trading, à la rotation rapide, à la vitrine. Troyes aligne les cessions records, dont la plus élevée de l'histoire de la L2, mais reste structurellement trop faible pour construire une équipe pérenne. En 2023-2024, le club n'a dû son maintien en deuxième division qu'à la rétrogradation administrative de Bordeaux. Un rappel brutal : encaisser ne suffit pas.
Une vitrine en or, une boutique vide
Sur le marché, Troyes domine la L2 avec 28,4 M€ de recettes sur le mercato estival actuel, soit mieux que 12 clubs de L1, en attendant une possible vente d'Abdoulaye Ndiaye pour au moins 7 M€. De l'autre côté ? Zéro dépense. Aucune autre équipe de la division n'affiche une balance commerciale aussi favorable. Et pourtant, aucune ne semble aussi peu armée pour jouer la montée. Les droits TV de la L2 (7,2 M€/an en 2024) ne permettent pas de compenser les manques structurels d'une formation aussi instable. L'argent rentre, mais il fuit aussitôt, absorbé par la trésorerie du groupe ou les déficits d'exploitation.
Dans les faits, l'ESTAC joue un rôle de laboratoire. Les prêts tournants (Kayky, Metinho, Irié), les investissements mutualisés avec Gérone ou Lommel, la modernisation du centre de formation, tout ou presque bénéficie au CFG. Mais rien ne garantit un retour tangible pour Troyes lui-même. Sur les onze derniers matchs de L2, seuls deux titulaires avaient plus d'un an de présence au club. Sans continuité ni cap, impossible de viser la montée à court terme. Et chaque été qui passe sans ambition sportive renforce l'idée que Troyes n'est plus un club de compétition, mais une annexe d'un conglomérat global.
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