Votre passion
pour les Bleus vous conduit traditionnellement à vous retrouver
au stade, pour acclamer vos champions. Hier soir, vous n'avez pas failli
à la règle. Un résultat indiscutable (5-0) qui a contribué
à une longue soirée de fête. Voici votre histoire !
Les matches amicaux ont cela de particulier
qu'ils n'intéressent généralement pas grand monde.
Pourtant, depuis un certain 12 juillet 1998, ce n'est plus vraiment le
cas chez nous. L'équipe de France est magique, remporte tous les
trophées et affiche quasiment complet à chacune de ses rencontres.
Vous venez les encourager, les admirer, parfois les bousculer. Mais votre
passion, vous la vivez également, avant et après la rencontre.
Les Ecossais admiratifs et admirés
Hier soir, 20 h 25, vingt minutes
avant le coup d'envoi, le Stade de France semble soudainement se remplir
de milliers de personnes. Quelques secondes auront suffi pour que le temps
s'accélère. Et pourtant, au-delà des tribunes, la
célébration de votre équipe a déjà commencé
depuis bien des heures. Aux alentours des entrées officielles, la
foule s'agglutine en masse devant les stands de buvette, une bière
par-ci, un sandwich par-là. Des groupes de supporters font connaissance
et les Ecossais se joignent à la fête. Car cette équipe
de France, au fond, ils l'admirent. D'abord parce qu'elle ridiculise leur
voisin anglais, qu'ils n'apprécient guère. Ensuite, parce
qu'ils adorent célébrer notre pays et faire la fête
avec les "Frenchies", comme pour le rugby. Il se déroule alors un
jeu bien étrange, qui consiste en un échange d'écharpes,
de maillots, de kilts, de casquettes, voire de maquillage. On essaie aussi
de dénicher le gros lot, comme une écharpe commémorative
de l'EdF, avec les dates de ces deux grandes victoires en Coupe du Monde
et en Championnat d'Europe.
Zizou laisse pantois !
Cette ambiance bon esprit, on la
retrouve dans le stade, même si, provocation sympatique oblige, on
siffle un peu les Ecossais. C'est bien moins grave que de ne pas respecter
une minute de silence ou un hymne étranger. Tant pis, car à
nos côtés, la splendide frappe de Zidane, vu de loin, avec
ce ballon qui change de trajectoire, pour venir se loger au fond des filets,
laissera pantois les Ecossais (12'). Et dire, qu'au moment du raté
plus ou moins comique de Barthez (1'), ils nous glissaient gentiment à
l'oreille qu'ils allaient se défendre comme des lions. Pas de chance,
pour eux, des ballons, ils n'en verraient pas souvent la couleur. Et assister
à la déroute de leur équipe, avec un but encaissé
toute les dix minutes, cela fait plutot mauvais genre. Le petit frère
avec sa soeur, la famille au complet, les simples amis ou les jeunes gamins
des banlieues, peuvent se lever et crier de toutes leurs forces, "et un,
et deux, et trois zéro". L'ironie dans l'histoire, c'est que la
"hola" n'aura pas attendu les dribbles de Zizou, le coup de patte magique
de Trézéguet (23' et 42') ou la belle reprise de Henry (33'),
pour prendre son envol.
Les Ecossais noient leur chagrin
dans la bière
Et pourtant, à la reprise,
après que Aimé Jacquet a lancé une tentative de record
du monde de transmission d'un texto à travers la France (NDLR :
pari remporté haut la main), l'ambiance plonge. Les choeurs écossais
peuvent profiter de ce sursaut pour faire entendre leurs clameurs. Ils
étaient 3.500 au stade. Pour le reste, il y a longtemps que pour
pleurer sur le sort, ils ont fait le plein de bière, et de trois
"pint", en moins de quinze minutes. Décidémment, cela les
reprend. Nous les avions déjà croisé la veille dans
un pub du quartier latin, puis toute l'après-midi à jouer
les touristes sur les Champs-Elysées, bière à la main.
Heureusement que leur défense s'est ressaisie, bloquant les accélérations
sur le côté de Henry, les passes ajustées de Petit
ou prenant au hors-jeu, un bleu tout heureux de marquer (m'enfin !). Le
public boude un peu son plaisir, plus de hola en perspective. Elle s'arrête
net du côté des vilains de la tribune Est, blasés !
Alors, cela se rattrape, en sifflant la rentrée de Karembeu et chacun
de ces ballons touchés, jusqu'à ce qu'il se joue de quelques
défenseurs écossais pour remiser au centre, entraînant
une ultime frappe et un arrêt du gardien (90+1').
Mais qu'arrive t-il à la
hola ?
Qu'il se console, Leboeuf avait connu
pareil sort, au moment de l'annonce de son nom dans l'équipe. Par
contre, les rentrées de Carrière, de Djorkaeff et de Marlet
ont visiblement satisfait. Ce dernier étant l'auteur du magnifique
dernier but, d'une frappe qui laissa de nouveau ébahi la défense
et le gardien, qui serait bien parti se coucher (87'). Dommage, pour les
quelques supporters, partis un peu avant la fin, pour éviter la
foule dans le RER. Mais ils n'auront pas manqué cette frappe trop
enlevée d'un Djorkaeff esseulé dans la surface, qui récupérait
un bon ballon venu de l'aile droite française (83'). Il était
encore trop froid, mais a bien réussi son retour afin de marquer
les esprits. Finalement, cette soirée était pour vous, amis
supporters, un véritable régal, un supplice pour les Ecossais
- mais ils ne nous en tiennent pas rigueur, bien trop contents de nous
avoir affrontés.
Le spectacle se terminait en apothéose,
avec un superbe feu d'artifice, dans un Stade de France resté comble.
Les Ecossais appréciant le choix d'une musique traditionnelle de
leur pays, pour accompagner l'un des tableaux. Auparavant, quatre cents
jeunes gens en maillot bleu, étaient venu allumer des flambeaux.
Ils formaient un message d'encouragement aux Bleus. Il vous restait à
tranquillement patienter pour monter dans les transports en commun. Destination
finale : votre petit chez-vous, les commentaires allant bon train et les
bières coulant toujours à flot dans les contre-allées
(avec modération... ?). Et devinez qui faisait le spectacle ? Les
Ecossais en kilt bien sûr ! Merci à vous tous et à
la prochaine !
Christophe
Andreeff
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