Pour la première fois depuis 1966, les Portugal se hisse en demi-finales de la Coupe du monde. Une qualification obtenue dans la douleur à l'issue d'un match pauvre et d'une séance de tirs au but illuminée par les arrêts de Ricardo (0-0, 3 tab 1). L'Angleterre, elle, rentre encore chez elle plus tôt que prévu.

Les enjeux du match

La Coupe du monde 2006 coïncide avec l'arrivée à maturité de la génération la plus talentueuse que l'Angleterre ait connue : Gerrard, Ferdinand, Terry, Lampard ou Ashley Cole vivent leurs meilleures années, Beckham ou Neville sont encore bons pour le service, Joe Cole et Rooney ont éclaté. Sur le papier, le onze anglais est le seul à concurrencer celui du Brésil. Hélas, les noms ne suffisent pas à gagner des titres : en 2002 comme lors de l'Euro 2004, Eriksson et sa bande se sont arrêtés au stade des quarts de finale. Il y a comme un air de «maintenant ou jamais» à celui qu'ils disputent aujourd'hui face au Portugal, 40 ans après leur unique trophée. Pour atteindre enfin le dernier carré, le technicien suédois aligne la même défense que depuis le début de la compétition, à savoir Robinson dans les buts, la paire Terry-Ferdinand dans l'axe et Ashley Cole à gauche, à laquelle il intègre Gary Neville, remis de blessure, sur le flanc droit. Hargreaves est seul à la récupération, Beckham et Joe Cole occupent les ailes. Lampard et Gerrard se promènent dans l'entrejeu en soutien de Rooney. Les premiers matches de l'Angleterre ont soulevé plus d'inquiétudes que d'enthousiasme. Même Sepp Blatter y est allé de son commentaire ( «Cette équipe n'offre pas le football offensif qu'on attend d'un prétendant au titre» ) ! Au-delà d'une victoire, on attend donc des coéquipiers de David Beckham qu'ils prouvent par la manière qu'ils ont les moyens de battre le Brésil ou l'Allemagne.

Considéré comme un favori, le Portugal ne jouit pourtant pas du même passé en Coupe du monde que l'Argentine ou l'Allemagne. Comme l'Angleterre, il n'a plus brillé sur la scène internationale depuis 1966 et la troisième place obtenue par les coéquipiers d'Eusebio. Une victoire dans ce Mondial 2006 serait un soulagement pour cet éternel outsider, et constituerait en même temps le baroud d'honneur de Luis Figo et l'avènement de la génération Cristiano Ronaldo. Dernier pays à ne jamais avoir remporté la Coupe du monde parmi ceux encore en course, le Portugal a l'occasion de réparer ce qu'il considère comme une erreur historique dès cet après-midi face aux Anglais, deux ans après avoir échoué en finale de son Euro, battu par la Grèce (1-0). Un championnat d'Europe lors duquel il avait éliminé... l'Angleterre en quarts. Ricardo dans les buts, Miguel, Carvalho, Meira et Nuno Valente en défense, Maniche, Petit et Tiago dans un milieu à trois «à la lyonnaise» , Figo et Cristiano Ronaldo sur les ailes et Pauleta seul devant. Telle est l'équipe mise en place par Luiz Felipe Scolari, qui voudra relever un défi plus personnel : avec onze victoires de suite en Coupe du monde, «le genre de chose qui marque n'importe quel entraîneur» , il détient un record. Un douzième succès ne serait pas de trop...

Les moments forts de la rencontre

- Gerrard transmet à Rooney dans l'axe. Le Mancunien contrôle, se retourne et frappe en demi-volée. Ricardo capte (9').

- Coup franc côté droit tiré par Figo. Le centre au deuxième poteau de l'Intériste est remis face au but par un Neville malchanceux. Tiago, à bout portant, ne parvient pas à pousser la balle au fond des filets (13').

- Ouverture de Gerrard devant le but de Ricardo. Il manque une pointure à Lampard pour couper la trajectoire du ballon (20').

- Figo repique à partir du côté gauche, efface Hargreaves et enveloppe sa frappe. C'est à côté. Il ne se passe plus grand-chose (39')…

- Corner joué en deux temps par les Portugais. Petit centre vers la tête de Tiago, que Robinson repousse difficilement (41').

- Sans solution à 20 mètres des cages de Ricardo, Lampard prend sa chance mais sa frappe puissante est bloquée par Ricardo (45').

- Long corner de Gerrard. Lampard, seul au deuxième poteau, rate sa reprise qui passe au-dessus (53').

- Parti du flanc droit, Lennon s'enfonce dans la surface et glisse le ballon en retrait : Rooney puis Joe Cole ratent la reprise alors que le but paraissait ouvert (59') !

- Carton rouge pour Rooney ! Après une âpre lutte avec Carvalho et Petit dans le rond central, le Mancunien s'agace et écrase la jambe du défenseur portugais, à terre (61').

- Miguel transmet à Maniche à l'entrée des seize mètres. Le centre piqué du milieu de terrain se transforme en un tir dangereux que Robinson dévie de justesse hors du cadre (78').

- Lourde frappe de Gerrard sur coup franc. Ricardo repousse sur Lennon mais la reprise du nouvel entrant est écrasée. Le gardien du Sporting se couche tranquillement (84').

- Hargreaves dévore le côté gauche et centre devant les buts. Lampard récupère après un cafouillage général mais tire au-dessus (90 + 2').

- Frappe juste au-dessus de Cristiano Ronaldo, à 20 mètres dans l'axe (102').

- Les centres se succèdent devant les cages anglaises. Une dernière tentative de Maniche sur un centre en retrait de Miguel passe au-dessus (120').

Tirs au but

Simao croise sa frappe et trompe Robinson, parti du bon côté. 1-0 pour le Portugal.

Ricardo plonge à sa gauche et repousse le tir de Lampard, décidément médiocre dans cette Coupe du monde. Les Portugais mènent toujours 1-0.

Viana prend Robinson à contre-pied mais sa frappe termine sur le poteau. Le score ne bouge pas.

Hargreaves est chanceux : sa tentative est touchée par le gardien portugais mais rentre quand même. C'est l'égalisation anglaise (1-1).

Petit croise trop sa frappe, c'est largement à côté. Beaucoup de penalties ratés dans ce Mondial… (1-1)

Ricardo détourne le penalty de Gerrard exactement comme celui de Lampard. Toujours 1-1.

Postiga croise et trompe Robinson avec une facilité apparente. Les Portugais reprennent l'avantage (2-1).

Carragher marque mais son penalty est à retirer à cause d'une course d'élan jugée non réglementaire. Sa seconde tentative est déviée par Ricardo sur sa barre. Les hommes de Scolari mènent 2-1.

Cristiano Ronaldo a l'occasion de qualifier son équipe. Il envoie tranquillement le ballon en lucarne et le Portugal en demi-finales (3-1).

La prestation du Portugal

Si les attaquants sont toujours capables, sur leur seule technique, de se créer des occasions, la défense s'est montrée quant à elle assez fébrile et spectatrice des mouvements offensifs anglais. Les attaques portugaises, moins construites que celles de leurs adversaires, ont seulement reposé sur la technique de Figo ou la vitesse de Ronaldo et Miguel en débordement. En supériorité numérique, les hommes de Scolari ont joué très haut et multiplié les centres tendus devant les buts, sans qu'aucun ne soit coupé par un attaquant. En prolongation, semblant plus fatigués que leurs adversaires, les vagues lusitaniennes, brouillonnes et trop lentes, ont buté sur l'arrière-garde anglaise, décidément l'une des plus solides du Mondial. A l'issue de la rencontre, on se disait finalement que les Anglais étaient peut-être ceux qui avaient fait le meilleur match, même réduits à dix.

Des trois milieux de terrain alignés par Scolari, Tiago était le plus offensif : le Lyonnais a débordé, remisé, soutenu Pauleta… Beaucoup d'activité, donc. Pauleta est totalement sous-exploité dans cette équipe où les solistes règnent en maître : les trois ballons qu'il a reçus l'ont été dos au but, à 20 ou 25 mètres des buts de Robinson. Figo s'est épuisé à tenter de redonner de l'allant à son équipe. Quelques percées sont à mettre à l'actif de Cristiano Ronaldo, mais on l'a connu plus présent. Comme à son habitude, Miguel a sonné la charge côté droit. Il est à l'origine des meilleures occasions de son équipe. Ricardo Carvalho a tenu Crouch en respect dans le domaine aérien, ce qui n'est pas un mince exploit. Quant au gardien de but Ricardo, il a montré comme lors de l'Euro 2004 que les penalties étaient son point fort. Trois arrêts en une séance !

La prestation anglaise

Privée d'un véritable créateur, l'équipe de Sven Göran Eriksson s'est appliquée à conserver le ballon très bas pour progresser petit à petit jusqu'à combiner aux abords des seize mètres adverses. Des attaques construites mais lentes, sans percussion, se concluant la plupart du temps par des frappes lointaines. Au fil de la première période, les Anglais ont de moins en moins été capable de porter le ballon devant, se contentant de le faire tourner entre défenseurs. A dix contre onze, Gerrard et les siens se sont regroupés derrière et ont joué long vers le grand Crouch en attente de soutien. Ce sont même eux qui ont le mieux fini la rencontre avec une dernière occasion dans les arrêts de jeu. Une domination qui s'est étendue à la prolongation, leur jeu aérien étant supérieur à celui de leurs adversaires.

Hargreaves avait pour mission d'aller d'un côté à l'autre du terrain pour bloquer les incursions des ailiers portugais. Il s'est bien acquitté de cette tâche épuisante, tout en contribuant aux incursions de son équipe. Gerrard a manqué quelques longues passes mais a bien décroché pour gêner Cristiano Ronaldo. Beckham, statique, n'a touché aucun ballon intéressant avant de céder sa place sur blessure à Lennon dès la 50ème minute. Ce dernier a enfin apporté un peu de vitesse à l'attaque d'Eriksson. Rooney n'a pas pesé sur la défense portugaise, au contraire de son remplaçant Peter Crouch, talentueux remiseur. A l'image de son penalty manqué, Frank Lampard, si brillant habituellement, aura traversé cette Coupe du monde comme une ombre. Mention spéciale à la défense anglaise (Ferdinand, Terry, Ashley Cole, Neville mais aussi Gerrard et Hargreaves), qui a contenu jusqu'au bout, et sans trop reculer, les vagues adverses.

La note du match

8/20. On pouvait attendre beaucoup mieux de ces deux prétendues grandes équipes. Leur jeu fut lent et stéréotypé (Deco a beaucoup manqué côté portugais). Il est par ailleurs vraiment détestable de constater que les prolongations ne servent plus qu'à attendre les tirs au but...

Angleterre - Portugal : 0-0 (1 tab 3)

Veltins-Arena (Gelsenkirchen)
52 000 spectateurs. Temps doux. Pelouse en bon état

Arbitre : M.Elizondo (ARG)

Angleterre : Robinson – Neville, Ferdinand, Terry, A. Cole – Hargreaves – Beckham (Lennon 52’) (Carragher 118’), Lampard, Gerrard, J. Cole (Crouch 65’) – Rooney.
Portugal : Ricardo – Miguel, Ricardo Carvalho, Meira, Nuno Valente – Maniche, Tiago (Hugo Viana 75’), Petit – Figo (Postiga 86’), Cristiano Ronaldo – Pauleta (Simao 63’).

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