Argentine : Messi a-t-il raison de songer à la fin ?
À 38 ans, Lionel Messi a laissé entendre qu'il venait sans doute de disputer son dernier match officiel en Argentine contre le Venezuela (3-0), la nuit dernière. Toutefois, ses performances et l'environnement bâti autour de lui posent une question paradoxale : pourquoi arrêter maintenant ?

Lionel Messi a-t-il disputé son dernier match en Argentine avec l'Albiceleste ? Aux côtés de ses trois fils pendant l'hymne, les larmes aux yeux, La Pulga a affiché une certaine émotion, comme s'il se remémorait toutes ces années avec la tunique de son pays. Et pourtant, paradoxalement, l'idée de le voir se retirer de la sélection à 38 ans n'est pas aussi claire.
Des chiffres qui parlent encore pour lui
Depuis le sacre au Qatar, la régularité de Messi en sélection interroge ceux qui veulent tourner la page trop vite. 16 buts et 6 passes décisives en 22 rencontres, cela reste le rendement d'un attaquant majeur. En 2023, il avait signé 8 buts et une passe en 8 matchs, en 2024, il a cumulé 6 réalisations et 5 offrandes en 11 sorties, et il a encore marqué un doublé en 2025 face au Venezuela (3-0), la nuit dernière. Le profil a changé mais pas le poids : ses courses se sont raréfiées, ses accélérations se font plus ciblées, mais l'impact demeure. Là où sa vitesse a décliné, il a compensé par une efficacité accrue dans la surface, par sa précision sur coups de pied arrêtés et sa faculté à punir à la moindre faille.
emplacement publicitaire
La stabilité de ses statistiques frappe d'autant plus qu'elle survient dans un football international de plus en plus exigeant physiquement. Peu de joueurs dépassant la trentaine conservent une telle constance, encore moins à ce poste et avec un tel niveau d'excellence. Avec une moyenne d'un but toutes les 110 minutes et d'une contribution toutes les 80 minutes depuis 2022, Messi reste au-dessus de Lautaro Martinez ou Julian Alvarez, pourtant dans la force de l'âge et performants en sélection. À l'échelle mondiale, rares sont les attaquants capables d'afficher ces ratios en sélection. À lui seul, il représente près d'un tiers des buts argentins depuis le sacre qatari, preuve de son influence toujours aussi intacte pour la formation triple championne du monde.
Une équipe construite pour le sublimer
Ce maintien de productivité prend d'autant plus de relief qu'il s'opère dans un cadre collectif bâti pour lui. Lionel Scaloni et son staff ont façonné une équipe pensée pour absorber ses manques et amplifier ses forces. Rodrigo De Paul et Alexis Mac Allister couvrent le terrain, Leandro Paredes et Enzo Fernandez stabilisent la relance, Lautaro et Alvarez multiplient les appels pour dégager son demi-espace favori. Le schéma argentin, souvent figé en 3-2-5 avec ballon, lui permet de recevoir entre les lignes et d'éliminer par la passe plutôt que par la course. L'idée n'est plus qu'il porte l'équipe mais que l'équipe le porte pour qu'il reste décisif. Cette mécanique, perfectionnée depuis 2021, est inédite par son degré de sacrifice et son efficacité répétée avec trois titres sur les trois dernières compétitions internationales disputées.
La dimension psychologique complète le tableau. L'Argentine post-Qatar n'a plus de débat interne sur son statut : chacun assume de courir, compenser, presser pour lui. Les «chiens de garde» – De Paul en premier – se définissent eux-mêmes comme ses protecteurs. Cette logique a effacé les polémiques d'autrefois, celles où Messi était accusé de prendre la place d'autres. L'Albiceleste vit désormais sur un code clair, le «tous pour Leo» , où l'héritage partagé a libéré le vestiaire d'une pression trop longtemps écrasante. Il n'a plus à sauver la patrie, il n'est plus le joueur qui doit tout faire, mais le finisseur et le catalyseur. Cette atmosphère mentale, forgée par les titres de 2021 et 2022, crée un confort inédit qui justifie aussi l'idée d'une prolongation, même à son âge.
Le Mondial 2026 comme jalon
Dans ces conditions, pourquoi arrêter dès maintenant ? Le Mondial 2026 est l'échéance naturelle pour jauger. S'il réussit un doublé historique, il posera son empreinte définitive comme le seul géant à avoir enchaîné deux sacres mondiaux dans l'ère moderne, et rien ne l'empêcherait alors de repousser encore sa sortie. Si le parcours reste solide, demi-finale ou finale, la légitimité de continuer quelques fenêtres internationales supplémentaires s'imposerait d'elle-même. Et si la sélection échoue prématurément, le signal serait clair, tant pour lui que pour l'équipe, de refermer un cycle particulièrement glorieux. Mais décider neuf mois avant, alors que son rendement reste supérieur à celui de ses concurrents internes, c'est courir le risque d'un départ prématuré.
Ce que Messi a enduré entre 2014 et 2020 renforce d'ailleurs l'argument. Pendant des années, il a été critiqué, caricaturé, accablé, systématiquement ramené dans l'ombre de Diego Maradona. Le titre en 2021 puis la Coupe du monde en 2022 ont fait sauter ce verrou psychologique et offert une nouvelle dynamique. Aujourd'hui, il joue entouré d'une génération mûre, qui l'assume, le protège et qui donne absolument tout pour lui. Se priver de ce contexte, alors qu'il n'avait jamais existé auparavant, serait presque paradoxal. Car pour la première fois de sa carrière internationale, Messi peut profiter d'un cadre qui lui permet de durer et de transmettre sans se consumer. Même à l'approche de la quarantaine.
Que doit faire Lionel Messi avec la sélection ? N'hésitez pas à réagir et débattre dans la zone «Ajouter un commentaire» ...