Algérie : le piège du conservatisme

Par Youcef Touaitia - Actu Can, Mise en ligne: le 11/06/2025 à 15h00
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A un an de la Coupe du monde 2026, l'Algérie se retrouve piégée dans un entre-deux inconfortable : une génération titrée au crépuscule et une relève prometteuse tenue à distance. Derrière les choix du sélectionneur Vladimir Petkovic, c'est toute la stratégie de continuité — ou d'immobilisme — qui interroge.

Algérie : le piège du conservatisme
Riyad Mahrez n'a plus le coup de rein d'antan.

Depuis son arrivée en février 2024, Vladimir Petkovic affiche un bilan comptable solide : 10 victoires, 2 nuls, 2 défaites. L'Algérie est bien placée pour se qualifier pour la Coupe du monde 2026, les signaux sont globalement au vert. Et pourtant, le doute persiste. Non pas sur les résultats immédiats, mais sur la capacité réelle de cette équipe à franchir un cap sur la scène internationale.

Car derrière les chiffres flatteurs se cache une réalité plus préoccupante : la Khadra repose encore massivement sur des cadres vieillissants, dans un football international devenu de plus en plus athlétique, rapide et exigeant. La question n'est plus de savoir si la qualification est en bonne voie mais de savoir si l'Algérie sera vraiment prête, au niveau qui compte, celui du haut niveau mondial.

Une équipe encore figée dans le souvenir

Lorsque le Suisse a été nommé à la tête des Fennecs, nombreux étaient ceux qui espéraient un électrochoc. Exit la nostalgie post-2019, place à une nouvelle ère. Mais très vite, les vieux réflexes sont revenus au galop. La colonne vertébrale de l'équipe reste inchangée, et ce malgré l'évidence physique : Aïssa Mandi (33 ans), Riyad Mahrez (34 ans), Baghdad Bounedjah (33 ans) ou encore Youcef Belaïli (33 ans) continuent d'être titularisés ou lancés dans les moments-clés. Un statu quo qui frôle parfois l'absurde, tant ces joueurs peinent désormais à tenir l'intensité imposée par le football de sélection moderne. Mahrez, en surpoids évident, ne fait quasiment plus de différences, n'assure aucun repli et n'a plus la capacité de battre son vis-à-vis. Le pressing ? Inexistant. Le rythme ? Trop élevé. Et pourtant, il reste un homme fort du projet. Le capitaine du navire.


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Ce constat, déjà palpable lors des CAN 2022 et 2024 — deux compétitions catastrophiques pour l'Algérie, éliminée dès la phase de groupes sans gagner un seul match — s'est encore confirmé face à la Suède (4-3), mardi. Menés 4-0, les Verts n'ont réagi qu'en lançant… Yassine Benzia (30 ans), Nabil Bentaleb (30 ans) et Bounedjah. Certes, ces derniers ont contribué au sursaut, mais le signal envoyé est limpide : les choix sont dictés par une forme de dette morale. Comme si la sélection nationale était devenue un terrain de reconnaissance sociale, où l'on honore les anciens avant de penser à la compétition. Ce n'est plus une équipe de projection, mais une équipe de prolongation. Prolongation de carrière, de parcours, de statuts. Et Petkovic, censé être l'homme des décisions fortes, semble s'en accommoder, malgré quelques différences apparentes avec Djamel Belmadi.

Une jeunesse pourtant brillante

Ce conservatisme exacerbé tranche violemment avec la richesse de la génération montante. Le réservoir de jeunes talents fait partie des plus intéressants du continent africain. Des profils comme Ibrahim Maza (19 ans), qui vient de signer au Bayer Leverkusen, Anis Hadj Moussa (23 ans), cadre du Feyenoord, Badredine Bouanani (20 ans), sur la pente ascendante à Nice, Amin Chiakha (19 ans), Yacine Titraoui (21 ans) et Adil Boulbina (22 ans) pourraient apporter fraîcheur, verticalité, et un potentiel tactique énorme. Pourtant, ces joueurs restent sous-exploités pour certains, snobés pour d'autres. Maza a dû se contenter de quelques minutes contre la Suède. Chiakha, lui, est resté en tribunes. Bouanani, Titraoui et Boulbina n'ont même pas été appelés pour ce rassemblement. Le message est double : l'avenir attendra et la hiérarchie n'est pas dictée par le mérite, mais par l'ancienneté.

Le paradoxe est criant lorsqu'on considère le groupe déjà en place. Des éléments comme Rayan Aït Nouri (24 ans), Jaouen Hadjam (22 ans), Fares Chaïbi (22 ans), Amine Gouiri (25 ans), Hicham Boudaoui (25 ans) ou Mohammed Amine Amoura (25 ans) ont tous l'âge, le niveau et l'expérience pour devenir le socle de l'équipe. Ces joueurs évoluent dans des championnats de haut niveau, disposent d'un volume de jeu supérieur à celui des anciens, et sont capables de répondre à l'exigence physique actuelle. Si certains sont des titulaires en puissance, d'autres restent en salle d'attente, devancés par des dinosaures en voie d'extinction. Le cycle post-2019 ne semble pas amorcé. Au contraire, il semble volontairement mis en pause. L'Algérie possède un futur, mais refuse de l'ouvrir.

Un passé glorieux devenu un piège politique

La CAN 2019 aurait pu être un tremplin, elle est devenue une prison mentale. Depuis ce sacre, la sélection n'a cessé de stagner. Deux crashs incompréhensibles lors des deux dernières CAN, absente de la Coupe du monde 2022 après un échec cruel contre le Cameroun en barrages, l'Algérie n'a pas su capitaliser. Le groupe de 2019, au lieu d'être progressivement renouvelé, a été sanctuarisé pour une partie. Chaque échéance est abordée avec les mêmes visages, les mêmes limites, les mêmes espoirs déçus. Une forme de zastoï – la politique de stagnation sous l'URSS de Brejnev - comme dirait l'histoire soviétique. Ce moment où tout continue de tourner, sans mouvement réel, sans ambition structurelle, dans une illusion de stabilité qui empêche tout véritable renouveau. Et l'audace, dans tout ça ?

Une audace qui manque cruellement au moment où la CAN 2025 et le Mondial 2026 se profilent. Au lieu de construire un projet sur l'énergie, le dynamisme et le volume de jeu des jeunes, Petkovic continue à miser sur une demi-équipe à bout de souffle, incapable d'imposer un pressing coordonné, de tenir un tempo, de répondre au défi physique. Une exigence beaucoup trop faible pour espérer relancer une machine qui s'est enrayée depuis trop longtemps. Reconnaissance ou performance, il y aura un choix à faire. Tant que Petkovic refusera de tourner la page avec clarté, le spectre d'un nouveau fiasco hantera chaque compétition. Et s'il ne tranche pas maintenant, ce n'est pas la génération 2019 qui sortira par la grande porte. C'est la génération 2025 qui ne rentrera jamais.

Vladimir Petkovic doit-il tourner la page avec les trentenaires avec l'Algérie ? N'hésitez pas à réagir et débattre dans la zone «Ajouter un commentaire» ...







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