Les saisons se suivent et se ressemblent pour Monaco. Partie avec l'ambition de concurrencer Lyon, l'équipe de Didier Deschamps se retrouve de nouveau distancée par celle de Gérard Houllier, qui l'a même battue samedi dernier en championnat. Mais cette fois, le mal est plus profond. Pas sûr que le victoire face à Willem II hier soir en Coupe UEFA suffise à relancer la machine...

Un recrutement critiqué

L'an dernier déjà, après les départs de Rothen, Giuly, Morientes ou Prso, l'entraîneur monégasque Didier Deschamps avait entrepris de rebâtir son équipe. Quelques stars étrangères étaient arrivées : Chevanton, Kallon ou Saviola. Le bilan tout juste satisfaisant de la saison 2004-2005 (3ème de L1) a poussé cet été l'ancien capitaine des Bleus à changer son fusil d'épaule en achetant cette fois des joueurs français. Les Rennais Olivier Sorlin et Toifilou Maoulida, tous deux âgés de 26 ans, sont ainsi arrivés, suivis du Bordelais Meriem, 25 ans. Olivier Kapo (24 ans) et Guillaume Warmuz (35 ans) ont respectivement quitté la Juve et le Borussia Dortmund pour atterrir sur le Rocher. Seule recrue étrangère, l'Espagnol Gerard, 28 ans, peu utilisé au Barça. Un marché risqué : Kapo n'a pas percé à la Juve, Gerard est remplaçant depuis plusieurs saisons et les deux Rennais, ainsi que Meriem, aussi doués soient-ils, doivent gagner une dimension supplémentaire, comme Rothen l'avait fait en quittant Troyes. Signalons également les départs de deux joueurs emblématiques, Rodriguez et Nonda, qui ont pu fragiliser l'effectif de l'ASM.

Tous les problèmes actuels proviennent de ce recrutement : il est critiqué par les joueurs eux-mêmes, tandis les dirigeants et le staff s'en rejettent la responsabilité. Et en effet, on ne peut pas dire qu'il donne satisfaction. Gerard passe plus de temps à l'infirmerie que sur le terrain, Olivier Sorlin est baladé du poste de milieu défensif à celui d'ailier droit. Maoulida ne pèse pas sur les défenses adverses et Camel Meriem confirme match après match qu'il est incapable de prendre le jeu d'une équipe à son compte. Quant à Olivier Kapo, sa discrétion n'a d'égale que l'injustice dont il a été victime à Lyon lorsque Mamadou Diarra l'a fait exclure en feignant d'être frappé. Finalement, seul Guillaume Warmuz tire son épingle du jeu : Flavio Roma blessé, l'ex-Lensois tient la cage monégasque sans qu'on puisse lui reprocher grand-chose. Mais les nouveaux ne sont pas seuls à composer l'équipe de l'ASM : parmi les «vieilles gloires» , seuls Bernardi et les défenseurs évoluent à peu près à leur niveau. Chevanton, constamment blessé, ne sert à rien.

Une crise à tous les étages

Au début de toute crise, il y a bien sûr des résultats décevants. La victoire de Monaco à Nancy lors de la 1ère journée du championnat (1-0), obtenue grâce à un but litigieux de Kapo, était un cache-misère. Dès le week-end suivant, les coéquipiers de Gaël Givet essuyaient une nette défaite à Louis II face à Auxerre (2-0). Et si l'ASM gagne à Strasbourg lors de la troisième journée, elle le doit en partie à de grosses erreurs d'arbitrage en sa faveur. Le 20 août, la défaite à Bordeaux (1-0) expulse l'équipe princière dans la deuxième moitié du classement, au 10ème rang, pour la première fois de la saison. Mais le vrai coup d'arrêt, les Monégasques vont le connaître trois jours plus tard, en tour préliminaire de la C1 face au Betis Séville. Défaits à l'aller 1-0, ils ne font que match nul à domicile au retour (2-2) et disent adieu à la compétition. Cinq ans que cela ne leur était pas arrivé ! Depuis, les Rouge et Blanc semblent avoir lâché prise en championnat : après un nul (0-0) contre Lens et une défaite à Lyon (2-1), ils sont 12èmes. La défense est moyenne (6 buts encaissés), l'attaque est l'une des plus faibles de L1 (4 buts inscrits).

Ce sont les cadres de l'effectif monégasque qui, les premiers, ont haussé le ton. Evra, Roma, Givet et Squillaci ont reproché à la direction son manque d'ambition, l'absence de soutien financier et le recrutement insuffisant qui en résultait. Sympa pour les recrues ! Montré du doigt, le président du club Michel Pastor a appelé les joueurs à «croire en eux» , une élégante manière de les remettre à leur place, et remis la faute sur les épaules de l'entraîneur. Le président de l'ASM n'a pas hésité à mettre en cause le bilan de l'ancien champion du monde à la tête de l'équipe, déclarant que la place de dauphin était «à notre portée» en 2004-2005. Alors, évidemment, Deschamps y est lui aussi allé de son communiqué. Selon lui, Baros, Fred ou Djibril Cissé auraient pu être recrutés si la direction s'était montrée plus généreuse : «A partir de cette saison, le club a décidé de changer de politique, en ayant pour objectif la mise à zéro sur le plan économique» explique-t-il. «Je n'ai pas sauté de joie en apprenant ce changement.» Bref, tous les organes du club se rejettent la responsabilité de la situation actuelle. Idéal pour repartir de l'avant...

Des raisons d'espérer

«Ce groupe n'a pas les moyens d'être champion de France.» L'aveu est de Didier Deschamps, après seulement six journées de Ligue 1 ! Il est vrai que Monaco est déjà à 9 points de l'OL, et que la faiblesse de son jeu ne l'autorise pas pour l'instant à espérer une grande saison. Mais tout de même, de la bouche d'un entraîneur, voilà une déclaration étonnante. Le pessimisme aurait-il à ce point envahi les têtes monégasques ? Deschamps ajoute : «Mais il n'a pas non plus le potentiel d'un club de milieu de tableau, notre place actuelle.» Ah, quand même ! Une chose est certaine, l'effectif de l'ASM, quoi qu'on pense des bouleversements qu'il a connu cet été, a les moyens de viser le Top 3, à défaut du titre. La défense n'a jamais pris l'eau cette saison. Quant à l'attaque, elle reposait ces derniers temps sur le jeune Gigliotti, 20 ans, et Toifilou Maoulida, Adebayor et Chevanton étant blessés. Ces deux-là revenus, les possibilités offensives de l'équipe princière augmenteront considérablement. Pour son retour, le Togolais a inscrit le second but de son équipe hier soir face à Willem II en Coupe UEFA. Au rayon blessures, il ne faut pas non plus oublier le Tchèque Jaroslav Plasil, sur le flanc depuis l'été.

Et puis, depuis quelques rencontres, Monaco a prouvé qu'il était capable, par instant, de jouer à un très bon niveau. N'a-t-il pas failli remonter deux buts à Lyon en étant réduit à dix ? D'ailleurs, ce match à Gerland était sûrement le meilleur de l'équipe cette saison. A défaut de Ligue des Champions, les joueurs de la Principauté ont en outre un bon coup à jouer en coupe UEFA, une compétition qui, à en voir les finalistes de l'an dernier (CSKA Moscou et Sporting Portugal), n'est pas très relevée. Hier soir, l'ASM est venue à bout des modestes Hollandais de Willem II (2-0) grâce à des buts d'Emmanuel Adebayor et d'Olivier Kapo, enfin décisif.

Pour la première fois depuis le départ de Jean-Louis Campora, Monaco a vécu une crise : à l'intérieur même du club, un conflit interne oppose joueurs et entraîneur, soudés, à la direction du club. Le recrutement est au centre de toutes les discussions, mais laissons-le temps aux recrues de prouver leur talent. La saison ne fait que commencer, rien ne sert de tirer des conclusions définitives.

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